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COMMUNISME Mouvement communiste et question nationale

La formation du modèle soviétique (1917-1945)

La question nationale dans la stratégie de la IIIe Internationale

Confrontée aux querelles nationales et aux conflits frontaliers qui agitent en permanence l'Europe centrale dans l'entre-deux-guerres, la IIIe Internationale n'a pas arrêté une position de principe de nature à lui donner une ligne de conduite homogène et cohérente dans ce domaine. Les débats théoriques qui agitaient le mouvement social-démocrate avant la Première Guerre mondiale n'ont plus cours et les décisions du mouvement communiste international sont entièrement déterminées par les enjeux stratégiques de la lutte contre les démocraties libérales et les États qui leur sont alliés, puis contre la menace fasciste en Europe et dans les dépendances coloniales. Ainsi la politique de la IIIe Internationale face à la question nationale est-elle l'objet de revirements successifs et les solutions qu'elle impose aux différends entre partis communistes européens n'obéissent-elles dans ce domaine à aucune règle fixe et sont souvent même empreintes d'une ambivalence irréductible.

Congrès des peuples d'Orient (Bakou, 1920) - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Congrès des peuples d'Orient (Bakou, 1920)

Dès sa création, en septembre 1919, et jusqu'en 1935, la IIIe Internationale s'efforce de porter la lutte contre les démocraties libérales dans leurs possessions coloniales. En 1920, face à l'échec du mouvement révolutionnaire sur le continent européen, elle se tourne vers les peuples d'Orient et les invite à relayer le prolétariat européen défaillant. La question nationale se réduit alors dans le cadre d'une stratégie anti-impérialiste à la question coloniale : parmi les vingt et une conditions que le IIe congrès de l'Internationale impose aux organisations candidates à l'adhésion figure seulement dans ce domaine l'obligation de combattre la domination coloniale et de « nourrir au cœur des travailleurs [...] des sentiments véritablement fraternels vis-à-vis de la population laborieuse des colonies et des nationalités opprimées ». Lorsqu'au cours de l'été de 1920 l'échec de l'Armée rouge devant les remparts de Varsovie dissipe les derniers espoirs que les bolcheviks fondaient dans la propagation de la révolution en Europe, le comité exécutif de la IIIe Internationale convoque, à l'initiative de la direction du Parti communiste russe, un congrès des peuples opprimés d'Orient qui se tient à Bakou au mois de septembre et auquel participent les représentants de près de quarante nationalités. Deux participants sur trois sont communistes, les autres sont « des représentants d'organisations révolutionnaires nationales et des personnalités sans parti, à tendances anti-impérialistes ». Au cours des débats s'opposent deux conceptions des mouvements de libération nationale dans les colonies : les dirigeants de l'Internationale situent en Europe l'épicentre du mouvement révolutionnaire et n'escomptent des mouvements de libération nationale dans les empires coloniaux qu'un appui tactique au prolétariat européen momentanément défaillant ; les communistes musulmans tel Turar Ryskoulov, délégué kazakh du Turkestan, estimaient en revanche que l'émancipation nationale des peuples colonisés constituait en elle-même une perspective révolutionnaire. Le TatarSultan Galiev avait exposé leurs vues en mars 1918, lors d'un congrès régional du Parti communiste russe à Kazan : « Tous les peuples musulmans colonisés sont des peuples prolétariens et, puisque toutes les classes de la société musulmane ont été autrefois opprimées par les colonialistes, toutes ont droit au titre de prolétaire. [...] On peut donc affirmer que le mouvement national dans les pays musulmans a le caractère d'une révolution socialiste. » La notion de peuples prolétaires est étrangère à la pensée des dirigeants de l'Internationale qui ne conçoivent pas que la[...]

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Écrit par

  • : chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques

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Médias

Congrès des peuples d'Orient (Bakou, 1920) - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Congrès des peuples d'Orient (Bakou, 1920)

Anastassi Ivanovitch Mikoyan et John F. Kennedy, 1962 - crédits : Keystone-France\Gamma-Rapho/ Getty Images

Anastassi Ivanovitch Mikoyan et John F. Kennedy, 1962

L'Arménie, République socialiste soviétique - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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