COMPORTEMENT ANIMAL Fondements du comportement
Stimuli-déclencheurs
Les stimuli-déclencheurs intra-spécifiques
Les stimuli-déclencheurs, décrits depuis les débuts de l'éthologie notamment par Konrad Lorenz et Nikolaas Tinbergen, sont des signaux, généralement assez simples, pour lesquels les animaux sont prédisposés génétiquement à réagir par des comportements particuliers, adaptés à ces stimuli. Par exemple, les jeunes goélands donnent des coups de bec sur une tache rouge située sur le bec de leurs parents, provoquant ainsi chez ces derniers la régurgitation de nourriture. Tinbergen montre, dès le début des années 1950, en présentant des leurres aux jeunes goélands, que la forme, la couleur ou la taille de la tête peuvent varier sans perturber ce comportement. La couleur de la tache reste cependant importante : les poussins préfèrent une tache rouge, mais ils donneront tout de même des coups de bec sur une tache noire par exemple, et cela d'autant plus que le contraste entre la tache et le fond sera plus marqué. Nikolaas Tinbergen et Donald Kuenen ont également placé devant de jeunes merles des leurres constitués de trois cercles représentant, respectivement, le corps, la tête et la queue d'un adulte afin d'observer dans quelle direction les oisillons tendraient le cou en ouvrant le bec. Ils ont constaté ainsi que c'est la taille relative des cercles qui permet aux oisillons de faire la différence entre la tête et la queue (fig. 1).Comme l'a démontré Tinbergen en 1951, un mâle épinoche réagit par l'agression à la couleur rouge du ventre de son rival, même si le rival n'est qu'un morceau de bois ovale dont le bas est peint en rouge. Un modèle de forme plus réaliste mais dépourvu de tache rouge ne sera pas attaqué (fig. 2). De la même façon, un rouge-gorge mâle agresse une simple touffe de plumes rouges alors qu'un rouge-gorge empaillé sans couleur rouge le laissera indifférent ; un autre oiseau, le petit-chanteur de Cuba, porteur d'une bande jaune sur la poitrine, se jettera sur un rouleau de papier si celui-ci comporte une marque jaune.
Chez les iguanes, les mâles portent une bande bleue sur le flanc. Si l'on reproduit une telle bande sur le flanc d'une femelle, celle-ci se fera agresser par les mâles ; inversement, les mâles chez lesquels la bande bleue a été camouflée seront courtisés par les autres mâles.
Les stimuli-déclencheurs peuvent également être acoustiques, les piaillements des oisillons stimulant chez les parents le comportement de nourrissage, ou chimiques, comme les odeurs émises par les femelles en œstrus par exemple.
Toutes ces observations montrent que beaucoup d'animaux répondent de façon génétiquement prédéterminée à ces stimuli-déclencheurs. Les animaux sont ainsi capables de se comporter de façon adaptée face à leurs parents, à des rivaux ou à des partenaires sexuels, sans qu'un apprentissage soit nécessaire. Il n'est pas surprenant que ces réponses à des stimuli-déclencheurs aient été sélectionnées par l'évolution dans des domaines cruciaux pour la survie ou la reproduction. L'inconvénient de ces réponses prédéterminées pour des signaux simples est le risque d'erreur (comme cela peut être mis en évidence dans les observations citées ci-dessus) mais il est relativement faible dans les conditions naturelles.
Stimuli-déclencheurs inter-spécifiques
Il existe également des stimuli-déclencheurs entre différentes espèces, pas forcément à bénéfices mutuels. Ainsi, les tiques sont attirées par l'acide butyrique émis par les animaux à sang chaud, les murènes chassent à l'olfaction et les couleuvres sont dès la naissance attirées par l'odeur de certaines proies. Les animaux symbiotiques développent aussi fréquemment des stimuli-déclencheurs leur permettant de communiquer. Par exemple, certains poissons ou crevettes se spécialisent dans le nettoyage[...]
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Écrit par
- Dalila BOVET : éthologue, maître de conférences
Classification
Médias
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