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CONCORDAT DE 1801

Les pourparlers de Paris

Presque deux longs mois s'écoulent d'abord avant que le gouvernement français daigne répondre à la lettre personnelle adressée le 10 juillet à Bonaparte par Pie VII pour lui notifier son acceptation de principe. Ce fut Talleyrand, « Autun » comme l'appellent couramment les dépêches de la Cour pontificale, qui, pour accusé de réception, expédia à Spina un passeport pour Paris où se poursuivraient les négociations. La désinvolture avec laquelle « Autun » transférait les pourparlers dans la capitale, sans entente préalable avec la Curie, ne laissa pas de froisser cette dernière. Mais beaucoup plus grave que cette incorrection lui paraît le calcul qui dicte cette mise en demeure impérative ; elle devine en effet sans peine qu'on vise à isoler le représentant du pape pour le réduire à ses propres moyens et lui arracher ainsi le maximum de concessions. Pie VII se résigne à laisser partir l'archevêque de Corinthe, mais, pour déjouer la manœuvre, modifie ses instructions et limite ses pouvoirs ; mandaté pour discuter les articles du futur concordat, Spina ne devait ni conclure ni signer. Le Saint-Père se réservait de le faire lui-même.

Pendant deux mois, aucune nouvelle de Spina, arrivé à Paris le 5 novembre 1800, ne parviendra à Rome. La première lettre reçue de lui le 10 janvier 1801, datée du 2 décembre, porte le numéro 8. Par la numérotation des lettres successives, Consalvi constate que la poste française en a retenu certaines et soupçonne que toutes sont passées au cabinet noir. Il s'en inquiète d'autant plus que le pauvre Spina, réduit aux conseils de Caselli, son secrétaire, est aux prises avec des partenaires redoutables, le ministre Talleyrand et le mandataire de celui-ci, l'énigmatique Bernier. Le premier, Rome ne le connaît que trop. Quant au second, ancien curé de Saint-Laud, ci-devant commissaire des armées catholiques et royales en Vendée, ce qu'en écrit Spina, indisposé par son œil louche et ses traits disgracieux, mais séduit par sa merveilleuse intelligence, ne rassure guère Consalvi : « Ses sentiments paraissent bons ; mais ce qu'il est au juste, je ne sais. » En réalité, Bernier, tout en présentant, selon ses propres termes, ex officio les exigences et les mises en demeure de son gouvernement, rendra les plus grands services au Saint-Siège : il pratique sans scrupule le double jeu et bien souvent suggère à l'archevêque de Corinthe, voire à la Cour romaine, le mezzo termine qui sauve la situation.

Spina et lui crurent aboutir rapidement, car ils s'accordèrent vite sur un premier projet que Bonaparte agréa. Mais, à ce premier projet jugé par lui trop favorable, l'insidieux Talleyrand en substitua un autre que le représentant du Saint-Siège repoussa. Bernier profita de l'indignation causée par la machine infernale de la rue Saint-Nicaise, attentat imputé d'abord aux Jacobins, pour proposer un troisième texte, avantageux pour le Saint-Siège. Mais alors intervient Fouché qui préparait un coup de théâtre : une fois acquises les preuves que les conjurés de nivôse appartenaient au parti royaliste, il démasque ceux-ci, et même compromet avec eux l'ex-jésuite Clorivière, oncle de Limoléan. Bonaparte, furieux, exige que Bernier présente un quatrième projet et que Spina le signe, comme traité définitif. Comme Spina objecte qu'il n'est pas habilité à conclure, le Premier consul dicte en style militaire un cinquième projet de son cru, que le courrier de Spina devait porter d'urgence à Rome pour le faire approuver. Il décide en outre de déléguer auprès du Saint-Siège un représentant officiel, Cacault, qui discuterait la convention avec le pape et la signerait sur place. Or cette expéditive, qui bouleversait les traditions de lenteur de la Cour romaine, faillit tout gâter. Faute de recevoir la rapide réponse qu'il escomptait, Bonaparte recourut à un véritable ultimatum :[...]

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