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CONCURRENCE, économie

Bilan économique de la concurrence

La liberté de concurrence est généralement appréciée pour les avantages qu'elle est censée apporter à la collectivité. Si la finalité de l'activité économique est le bien-être du consommateur, comment ne pas reconnaître que la concurrence libre et loyale y contribue puissamment ? En éliminant les causes d'arbitraire dans la formation des prix, en faisant pression sur les offreurs et sur les producteurs pour qu'ils proposent les meilleurs prix, le pouvoir d'achat des consommateurs est pris en compte. Ce d'autant plus que la pression sur les prix se double d'une pression sur les coûts de production sur lesquels les prix s'alignent, sous réserve d'un taux de marge raisonnable. Certes, le processus peut être douloureux à court terme pour les employés des firmes mises en difficulté ; mais la liberté de se tourner vers d'autres activités, de changer d'employeur qui est inhérente à la libre concurrence doit faciliter les reconversions. Et, trop souvent, les combats d'arrière-garde menés dans des secteurs traditionnels ne doivent pas faire oublier que l'intérêt des consommateurs que nous sommes tous, du premier jour au dernier, peut légitimement l'emporter sur le corporatisme de métiers en perte de vitesse. Les produits nouveaux, générateurs d'emplois, sont à la base du progrès économique et social et, comme les traités européens l'affirment, la liberté de concurrence mérite d'être défendue contre les rentes de situation, les protections artificiellement consenties par les gouvernements soumis à la pression des lobbies. Tel est le sens des règles de concurrence qui, à la suite de la législation antitrust américaine, ont été adoptées et sont mises en œuvre dans l'Union européenne et dans un nombre croissant de nations.

Certains faits incitent toutefois à nuancer l'appréciation positive que la théorie dominante attribue aux bienfaits de la concurrence. Les secteurs d'activité ne se prêtent pas tous sans dommage à la libre concurrence. C'est bien elle qui, dans l'euphorie des années 1990-2000, a poussé les intermédiaires financiers à attirer des couches de clientèle peu solvables, dans l'espoir de conserver leurs parts de marché ou de satisfaire leur avidité. La concurrence que les pêcheurs se livrent avec des matériels de plus en plus puissants menace le renouvellement d'une ressource naturelles épuisable. La politique de concurrence défendue à Bruxelles, qui impose de démanteler certains monopoles de services collectifs en distinguant réseaux d'infrastructure et entreprises d'exploitation de services, nuit au bon fonctionnement d'opérateurs complémentaires. Les contrôles d'opérations de concentration ne tiennent pas toujours suffisamment compte des traits particuliers de la concurrence internationale.

Si la gratuité du recours aux services d'Internet permet aux consommateurs de gagner du temps et de se fournir au meilleur prix, par exemple dans le domaine de la presse et de l'édition, on n'a pas pris la mesure des dégâts provoqués dans ces secteurs. De plus, les modèles d'entreprise sont bouleversés dans tous les cas où des services « gratuits » ne sont pas payés à leurs vrais coûts, parce qu'ils sont en fait soit financés par des recettes publicitaires sans rapport avec l'activité première du prestataire de services, soit par des activités plus lucratives de l'entreprise. Inversement, la liberté de concurrence qui encourage la multiplication des tarifs n'immunise pas le contre l'arbitraire des compagnies de transport aérien. Et la volonté d'éviter à tels clients la désagréable surprise de voir que le prix payé subventionne la consommation d'autres clients (subvention croisée entre produits) conduit à une prolifération de prix, tous censés refléter le vrai coût du produit offert,[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite d'économie à l'université de Paris-IX-Dauphine

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