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CONDENSATION, psychanalyse

Formation caractéristique de l'inconscient, la condensation résulte d'un travail de « compression », dont Freud dit qu'il est essentiellement différent d'un simple résumé. Mise en évidence dans le rêve, la condensation devient, dans l'analyse du mot d'esprit, « la catégorie à laquelle sont subordonnées toutes les autres ». En ce sens, elle est la simple expression de la tendance à l'épargne qui domine tous les processus psychiques : le problème de toute représentation inconsciente étant de trouver un « délégué » au niveau du conscient ou du préconscient, la règle de condensation tend alors à s'identifier au principe d'économie.

Cependant, étant donné l'introduction par Freud du concept de déplacement, il importe d'élaborer une définition plus étroite de la condensation en la différenciant de ce dernier tant au niveau dynamique qu'au niveau économique. Cette tâche fut tout particulièrement celle de Jacques Lacan qui, retrouvant l'origine linguistique des termes, a montré comment l'opposition des deux concepts recouvrait l'opposition, notamment développée par Roman Jakobson à propos de l'aphasie, entre métaphore et métonymie.

Frappé par la discrépance entre la brièveté du texte du rêve et l'étendue des associations qu'il suppose, Freud s'est interrogé sur les procédés de compression utilisés, suivant que des éléments de nature commune, disparate ou même contraire se trouvaient réunis dans un « point nodal », un « type mixte » ou un « moyen terme ». Dans chacun de ces cas, la condensation est certes le résultat d'une omission, ou plutôt d'une ellipse ou d'une élision, pour emprunter le langage de la grammaire et celui de la poésie. Mais elle est en même temps le fruit d'une surdétermination qui aboutit à la création de termes-carrefours, d'images génériques et de compromis : « Le processus de condensation, écrit Freud, est particulièrement sensible quand il atteint les mots et les noms. » Traitées comme des choses, les expressions verbales deviennent aussi opaques que celles-ci.

On ne saurait, dans ces conditions, méconnaître la connaturalité, soulignée dans le terme allemand Verdichtung, du travail de condensation avec le processus de création poétique. Si toute figure de rhétorique se définit comme écart par rapport à une première expression, elle révèle tout autant les potentialités jusque-là méconnues d'un noyau sémantique identique. La métaphore apparaît ainsi comme l'emploi d'un terme dans un sens proche du sens habituel ; et quand la « faucille d'or », pour reprendre l'exemple lacanien, prend position au champ étoilé, c'est pour révéler un possible tant de l'instrument agraire que de l'astre lunaire. Le « sème » et le « phore », suivant l'expression de C. Perelman, échangent mutuellement leur sens — chose exclue dans la métonymie, où le mot désigne un objet qui ne lui est point semblable, mais s'est trouvé lui être associé dans l'expérience.

Le travail de condensation métaphorique se distingue ainsi du déplacement métonymique par le type de transposition qu'il instaure : il met en œuvre des représentations qui « insistent », des représentations qui ont du rapport entre elles quant au contenu, non des représentations qui sont seulement entrées en connexion historiquement avec d'autres. La condensation ramène à un texte, voire à un terme unique, qui ne cesse de s'alourdir de sens en devenant paradigmatique, tandis que le déplacement renvoie toujours ailleurs, à la chaîne syntagmatique. En ce sens, la condensation est la catégorie esthétique par excellence, puisque le manque y est masqué par la compénétration apparente des opposés.

— Baldine SAINT GIRONS

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