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CONFÉRENCES DE L'ACADÉMIE ROYALE DE PEINTURE ET DE SCULPTURE

La bibliothèque de l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris (É.N.S.B.A) conserve dans ses archives un grand nombre de manuscrits relatifs à l'histoire de l'Académie royale de peinture et de sculpture qui y furent transférés depuis l'ancienne institution voici deux siècles. Une partie non négligeable de ces documents est constituée de ce qu'il est convenu d'appeler « conférences » : un corpus assez hétérogène, composé de textes destinés à être lus et débattus dans des séances académiques et dont le contenu traite de questions importantes touchant à la théorie et à la pratique de la peinture et de la sculpture. Le terme conférence en effet ne désignait, au xviie et au xviiie siècle, pas autre chose que des « entretiens de quelques particuliers assemblés pour parler d'affaires ou d'études » (Furetière, Dictionnaire universel). On a donc ici des réflexions de « gens de métier » sur les principes et les beautés, des exposés sur des difficultés de leur travail et sur les moyens de les surmonter.

Lors de la fondation de l'Académie, officiellement en 1648 sous le patronage du jeune Louis XIV, les statuts, s'inspirant de la tradition italienne des académies de Florence, de Bologne et de Rome, prévoyaient déjà des réunions périodiques informelles consacrées à discuter de questions artistiques. « L'on parlera dans ladite académie des arts de peinture et de sculpture », y lit-on ; « Partout, lesdits Académistes diront librement leurs sentiments à ceux qui proposeront les difficultés de l'art pour les résoudre, ou lorsqu'ils feront voir leurs desseins, tableaux et ouvrages de relief, pour en avoir leur advis. » L'idée évolue et se précise avec le temps : les Procès verbaux des séances de l'Académie rapportent, au 3 mai 1653, que la résolution fut prise que « l'on doit s'entretenir des sciences et raisonnements des arts de peinture et de sculpture », et « qu'il sera dressé une table des principales matières de cet entretien, et chacun de la compagnie exhorté d'apporter dans l'assemblée suivante leurs avis par écrit, pour en icelle et sur lesdits avis, former ladite table ».

Du « parler des arts » à « la science et raisonnements » : la nouvelle ambition n'est pas due au hasard, à un moment où la Compagnie, jointe à l'ancienne Maîtrise depuis deux ans et en querelle permanente avec celle-ci, tient à s'en distinguer en affirmant la nature intellectuelle, libérale du travail de ses propres membres, contrairement à l'exercice mécanique de l'art pratiqué par les artisans de la Maîtrise.

Les statuts de 1655, puis ceux de 1663, prévoient la tenue régulière des conférences, mais les académiciens ne semblent avoir suivi le règlement qu'épisodiquement, du moins à en juger d'après les documents conservés. Cela devait changer à partir de janvier 1666, après la ferme intervention de Colbert, surintendant des Bâtiments et vice-protecteur de l'Académie, qui en propose une réorganisation. Lors d'une importante assemblée extraordinaire, le 9 avril 1667, Colbert confirme ce qu'il avait « ordonné au mois de janvier, à savoir de tirer du Cabinet du Roi les beaux tableaux des habiles hommes pour expliquer, en présence de la Compagnie et des élèves, les beautés qui se rencontreront, et que pour cet effet Monsieur Le Brun commencera, le premier samedi du mois de mai, sur le tableau du saint Michel de Raphaël ».

À partir de là, et jusqu'à la mort de Colbert (1683), la régularité des conférences fut maintenue, la rédaction de nouvelles introductions aux conférences et la relecture des anciennes alternant jusqu'à la dissolution de la Compagnie en août 1793, la qualité d'expression, la maîtrise conceptuelle évoluant elles-mêmes à partir de 1700, dans un contexte nouveau[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences en histoire de l'art à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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