CONFUSION MENTALE
Aspects cliniques
À travers ces multiples variétés étiologiques, ce qui fait la spécificité de la confusion mentale, c'est la dégradation de la conscience vigile qui apparente l'état confusionnel au sommeil et l'onirisme à l'état de rêve. L'allure du sujet confus est à cet égard caractéristique, et le diagnostic s'impose aussitôt : il semble égaré, hébété, perdu. Ses gestes hésitants, inachevés, son discours chuchoté, peu suivi, voire incohérent, traduisent l'obscurcissement d'une conscience qui a perdu la possibilité d'identifier correctement le monde extérieur, de différencier les contenus psychiques, de les ordonner et de les synthétiser. Le confus est absent du monde ; il confond les situations, mélange les identités ; il ne reconnaît pas ses proches, prend une personne pour une autre (fausse reconnaissance), ne sait ni la date ni l'heure, ignore le lieu où il se trouve, les circonstances de sa maladie. Il y a cependant des moments où il semble s'éveiller ; perplexe, il interroge, cherche des repères qui l'aident à se situer, fait des efforts pour se souvenir, pour comprendre ce qui lui arrive. Cela dure quelques minutes ou quelques heures, puis il retombe dans sa torpeur et dans ses songes. C'est ordinairement aux approches de la nuit, à l'heure où vient normalement le sommeil que la pensée s'obscurcit davantage et que l'expérience onirique, discrète ou discontinue pendant le jour, envahit complètement le champ de conscience. Le confus ne dort pas, il est pris par un rêve qui s'impose à lui, le rive, l'enchaîne, et dans la fantasmagorie duquel il s'engage totalement. Les images oniriques défilent en une succession discontinue ou s'ordonnent en un enchaînement scénique dont la thématique tour à tour le captive ou le terrifie. Le monde extérieur sert de support aux projections hallucinatoires, mais surtout, mal perçu, déformé, il concourt à dramatiser l'ambiance ; les voix sont amplifiées, menaçantes, les visages grimaçants ou hostiles. Loin d'être, comme le dormeur, un spectateur passif de son rêve, le confus s'engage entièrement dans son délire, en vit activement les scènes. C'est alors qu'il s'agite, qu'il se débat, attaque les ennemis qui l'entourent, cherche à fuir les scènes de carnage, d'épouvante ; des animaux répugnants ou féroces peuplent souvent ces cauchemars, surtout dans l'onirisme alcoolique. Il y a des onirismes moins chargés d'angoisse où le sujet mime des scènes de vie professionnelle, s'adresse aux spectateurs comme s'ils étaient ses compagnons de travail, recommence indéfiniment les mêmes gestes qu'il accompagne de commentaires ou de mimiques d'impuissance. Il y a même des onirismes à tonalité agréable : le sujet assiste, fasciné, ravi, au défilé kaléidoscopique de petits personnages colorés, se laisse captiver par des jeux d'ombres chinoises, enchaîner par des scènes féeriques ou s'abîme extasié dans une vision paradisiaque. La force de ces images oniriques est telle que leur souvenir persiste plusieurs jours après la disparition de l'état confusionnel ; le malade s'interroge alors sur la réalité des scènes « vécues en rêve », puis peu à peu le souvenir s'en estompe et disparaît totalement.
Psychose aiguë, généralement due à une agression exogène, la confusion mentale n'a pas en elle-même de gravité particulière. Si l'on excepte les formes sévères que leur étiologie rend plus inquiétantes, on ne peut que souscrire à l'opinion de Régis qui en faisait « la plus curable des psychoses ». Sa durée, habituellement brève, va de quelques jours à quelques semaines ; le début et la fin de la confusion peuvent être brusques ou progressifs, c'est-à-dire caractérisés par des étapes graduelles de la destructuration[...]
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Écrit par
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