CONGRÉGATIONALISME
Les avatars du congrégationalisme
Les partisans de ce système ecclésiastique furent persécutés et durent s'organiser en communautés clandestines. Plusieurs historiens de ce mouvement voient dans la congrégation secrète connue sous le nom de « Privye Church », et découverte par les autorités en 1567, la plus ancienne de leur Église (Dale, Peel). Robert Browne (vers 1550-1630) exposa le premier les théories du congrégationalisme, notamment dans son livre A Booke Which Sheweth the Life and Manners of All True Christians (Un livre pour enseigner la vie et les manières de tout vrai chrétien). En 1590, il réintégra cependant l'Église anglicane ; trois ans plus tard, ses anciens amis Barrowe et Greenwood furent pendus et la plupart des congrégationalistes émigrèrent en Hollande.
Une congrégation se reconstitua à Londres en 1616 ; plusieurs autres se créèrent en divers endroits pendant la lutte du Parlement contre la royauté. Les congrégationalistes ou « indépendants » (le second terme a une tonalité plus « politique ») arrivèrent au pouvoir grâce à la chute de la royauté : Olivier Cromwell, Milton, Hampden se rallièrent à eux. Sous le protectorat de Richard Cromwell (qui souhaitait la réunion des congrégationalistes et des presbytériens), ils préparèrent, à la conférence du Savoy, une « Déclaration de foi et d'organisation conforme à la pratique des Églises congrégationalistes d'Angleterre », où ils insistaient à la fois sur leur accord doctrinal avec l'assemblée presbytérienne de Westminster et sur leur propre système ecclésiastique, en partie amputé d'ailleurs par la répudiation complète du rôle de l'État.
La restauration fut hostile aux congrégationalistes, mais l'« Acte de tolérance », promulgué par Guillaume d'Orange à la suite de la révolution de 1688 mit fin aux persécutions. Au xviiie siècle, les princes de la maison de Hanovre accordèrent la liberté politique et religieuse à tous les protestants.
En 1620, une centaine de congrégationalistes anglais exilés en Hollande, les Pilgrim Fathers, arrivèrent en Amérique à bord du Mayflower et fondèrent New Plymouth. Lors du retour des Stuart, des milliers d'indépendants émigrèrent en Nouvelle-Angleterre. Ils se donnèrent un régime politico-ecclésiastique identique : les lois et les affaires de l'Église étaient votées par les citoyens.
Il faut distinguer les Églises qui s'intitulent congrégationalistes et qui existent dans plusieurs pays anglo-saxons notamment, et l'ensemble des Églises protestantes dont l'organisation est de type congrégationaliste mais qui ont une autre désignation : baptisme, pentecôtisme, etc. Les Églises congrégationalistes se sont rapprochées des Églises presbytériennes (ou réformées). Elles ont adhéré, en 1970, à l'Alliance réformée mondiale. Les Églises baptistes ont leur propre fédération : l'Alliance baptiste mondiale.
Le congrégationalisme a été combattu à l'intérieur du protestantisme pour des raisons d'« ordre » et de « discipline » : ainsi, le synode de 1644 de l'Église réformée de France (Église qui eut, au xvie et même au xviie siècle, une assez forte tendance congrégationaliste) conjura diverses communautés locales de sauvegarder « la paix et l'uniformité de la religion », mises en danger par le « poison » de l'indépendantisme qui aurait conduit à « se former autant de religions qu'il y a d'assemblées particulières ». Il est possible de se demander, malgré de telles attaques, si le congrégationalisme ne met pas en valeur certains principes essentiels de la Réforme : sacerdoce universel, primauté de l'Église locale, indépendance vis-à-vis de l'État.
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Écrit par
- Jean BAUBÉROT : directeur d'études émérite du groupe Sociétés, religions, laïcités au C.N.R.S.
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