CONNEXITÉ, mathématique
L'analyse moderne est née de l'étude des fonctions réelles f définies sur un intervalle I du corps ℝ des nombres réels, et tout particulièrement de celles qui sont continues. On sait qu'alors f est bornée, admet un maximum et un minimum et est même uniformément continue, si I est un segment. Mais la plus importante de ses propriétés est de ne pouvoir passer d'une valeur positive à une valeur négative sans s'annuler, comme Cauchy et Bolzano l'ont bien perçu dès le début du xixe siècle.
Cette propriété très intuitive vaut pour tout intervalle I, et non seulement pour les segments. Un peu plus généralement, elle peut s'énoncer sous la forme suivante : l'image d'un intervalle par une fonction continue réelle est un intervalle. La notion de partie connexe C d'un espace topologique (E, O) est une généralisation naturelle des intervalles destinée à parvenir au théorème suivant : l'image d'une partie connexe par une fonction continue est une partie connexe, conçue de manière à ce que les parties connexes de ℝ soient exactement ses intervalles, c'est-à-dire ses parties « sans trou ».
La définition choisie au début du xxe siècle est extrêmement simple : C est une partie connexe de E si elle ne peut être décomposée en deux parties complémentaires non vides, A et B, telles que la fonction de C dans ℝ définie par f(x) = 1 si x appartient à A et f(x) = 0 si x appartient à B soit continue.
En termes plus abstraits, cela signifie que, pour toute partie stricte A de C, il n'existe pas d'ouverts U et V de E tels que A soit, à la fois l'intersection de A et de U, et l'ensemble des éléments de C extérieurs à V. Autrement dit, pour toute décomposition (A, B) comme ci-dessus, il n'existe pas d'ouverts U et V de E contenant respectivement A et B et tels que l'intersection des ensembles C, U et V soit vide (que U et V soient eux-mêmes disjoints est courant, mais pas indispensable). Si E est une partie connexe de lui-même, on dit que (E, O) est un espace connexe.
Prouver qu'un connexe de ℝ est un intervalle est facile, mais la réciproque est plus délicate. Si a et b sont deux éléments d'un intervalle non connexe C appartenant respectivement à A et B, alors on peut définir deux suites dites « adjacentes » de la forme an+1 ≥ an < bn ≥ bn+1 avec bn – an tendant vers 0, avec an dans A et bn dans B, dont la limite commune devrait à la fois appartenir à A et B, ce qui contredit le fait que ces deux parties sont supposées disjointes.
En dehors du fait que les fonctions continues conservent la propriété de connexité, ce qui est très facile à prouver, l'utilisation essentielle de ce concept réside certainement dans les généralisations naturelles du théorème fondamental selon lequel « une fonction de dérivée nulle est constante ». Écrite sous cette forme, cette propriété est inexacte si la fonction n'est pas définie sur ℝ entier, comme le montre l'exemple de la fonction signe, prenant la valeur 1 pour x > 0 et – 1 pour x < 0. Le bon énoncé est le suivant : une fonction de dérivée nulle sur un intervalle est constante sur cet intervalle. On peut l'étendre aux fonctions de plusieurs variables.
On est souvent conduit à rechercher des parties connexes C d'une partie X d'un espace topologique (E, O) aussi grandes que possible, c'est-à-dire dont la réunion soit X et qui soient deux à deux disjointes. Ces ensembles sont appelés composantes connexes de X. Toute suite d'éléments de C qui converge dans X a sa limite dans C : on dit que C est fermée relativement à X.
Dans le cas particulier où X est un ouvert de ℝ, ces composantes sont des intervalles ouverts. On peut montrer que, si ces composantes sont en nombre infini, elles définissent une famille dénombrable, c'est-à-dire qui peut[...]
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Écrit par
- André WARUSFEL : universitaire
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