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CONSOMMATION Critiques de la consommation

Les raisons d'être mécontent

Sans prendre parti sur la notion floue et controversée de « société de consommation », on ne peut que constater l'accroissement du volume et des types de biens et de services. Si l'on prend des exemples emblématiques comme ceux du réfrigérateur, de la voiture ou de la télévision, on observe sur quelques décennies une diffusion très importante de ces biens. Le consommateur est devenu dans cette période une figure à la fois visible et indéterminée, une figure censée, d'une part, chercher sur le marché des biens correspondant à ses attentes, et, d'autre part, faire le choix le plus rationnel.

La satisfaction des consommateurs s'est accompagnée d'une multitude de griefs. Les plus traditionnels sont d'ordre proprement économique : les prix sont élevés voire maintenus artificiellement à un niveau élevé (entente occulte entre constructeurs, distributeurs, différences importantes entre lieux, entre distributeurs, prix d'appel qui incitent à choisir une enseigne pour quelques articles, gonflement des prix par le jeu des marques...). Une autre catégorie de griefs concerne les propriétés du bien : la qualité est jugée médiocre alors même qu'il n'y a pas de vices cachés, sa durée de vie insuffisante, ou, ce qui revient au même, le service après-vente est défaillant, le consommateur se trouvant encombré d'un bien inutile ou dégradé. Enfin, grief plus général, le consommateur apparaît démuni. Si les cas les plus visibles sont ceux des personnes économiquement ou psychologiquement vulnérables (enfants, personnes âgées, sous-prolétaires, etc.), victimes de leur naïveté et de la contrainte des circonstances, il faut aussi compter, à côté de ceux-ci, avec une inégalité systématique dans l'information : le consommateur est maintenu dans l'ignorance des caractéristiques techniques d'un bien ou dans celle des implications juridiques de l'achat, le vendeur sait des choses qu'ignore le consommateur, il peut « forcer » la vente en usant de séduction, de persuasion. La publicité, même quand elle n'est pas formellement « mensongère », est une cible évidente des critiques mettant en avant les pièges tendus aux consommateurs. Toute la question est de savoir jusqu'où s'étend l'emprise présumée de la publicité : peut-on vraiment faire acheter n'importe quoi à n'importe qui ?

Ces griefs renvoient à deux problèmes et, en premier lieu, à celui de la délimitation entre les vrais et les faux besoins. La défense des consommateurs enferme souvent l'ambition de trancher entre ce que veulent les consommateurs par eux-mêmes et les suggestions plus ou moins insidieuses produites par les modes, la publicité, la course à l'innovation. La difficulté est ici de prendre position dans ce qui est un débat entre parties prenantes : les uns affirment qu'il existe des critères de distinction entre vrai et faux, même s'il ne sont pas immédiatement évidents ; les autres que les vrais besoins sont simplement ceux qui s'expriment à travers les choix effectifs des consommateurs. Le second problème est celui de l'atomisation des consommateurs qui semblent condamnés à souffrir dans la solitude des imperfections du marché. Or, dans la critique des séductions et des mensonges de la consommation, est contenu, d'un même mouvement, un appel à la prise de conscience des consommateurs qui peut revêtir plusieurs formes, allant de l'information au boycott en passant par les campagnes de presse, le recours aux tribunaux, etc.

Il faudrait préciser que les consommateurs ne sont pas voués à une confrontation abrupte avec producteurs et vendeurs. L'État intervient, comme tierce partie, de multiples façons : définition de la qualité (et de la fraude), réglementation des contrats, de l'information, du [...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au C.N.R.S.

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Média

Manifestation antimondialiste - crédits : Pascal Le Segretain/ Sygma/ Getty Images

Manifestation antimondialiste

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