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BRANCUSI CONSTANTIN (1876-1957)

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« Chaque matériau a sa vie propre »

Bien que Brancusi écrive plus tard avec fierté : « depuis 1907, je travaille seul à Paris », il est guidé dans sa redécouverte de la taille directe de la pierre tant par l’art traditionnel roumain en bois, auquel il emprunte même certains motifs, que par l’influence de Gauguin et de l’art primitif. Il est aussi accompagné par André Derain, Picasso, Modigliani, Henri Gaudier-Brzeska, Zadkine, et d’autres artistes moins modernes, tels que Joseph Bernard (1866-1931), auquel on doit notamment Effort vers la nature (1905-1906, Paris, musée d’Orsay). De cette technique, antirodinienne – puisque Rodin s’imposait comme le grand génie du modelage –, Brancusi se fera toute sa vie le champion, taillant la pierre et le bois dans un esprit artisanal. Il accorde ainsi à la matière un rôle capital dans l’élaboration de la forme même. « On ne peut pas faire ce qu’on veut, écrivait-il, mais ce que le matériau permet. On ne peut pas faire en marbre ce que l’on voudrait réaliser en bois… […] Chaque matériau a sa vie propre et l’on ne peut détruire une matière vivante pour la transformer en une chose muette et inerte sans en être puni. » Le principe du respect de la matière conduit Brancusi à la recherche de formes primordiales, simplifiées, telles que l’ovale (La Muse endormie, 1909-1910, Washington, Hirshhorn Museum and Sculpture Garden ; Le Commencement du monde, 1920, Dallas, Museum of Art) ou le disque (Table du silence, 1938, Targu Jiu) ou encore la verticalité élancée, avec la série des Oiseaux dans l’espace dès 1923, qui ne se réduisent jamais à des abstractions géométriques : « On a pris la simplicité comme but, pendant que la simplicité est la complexité elle-même », affirmait Brancusi. Cette « simplicité parfaite » n’est pas tant affaire de procédé technique que d’ambition esthétique : « La taille directe c’est le vrai chemin vers la sculpture, mais aussi le plus mauvais pour ceux qui ne savent pas marcher. Et, à la fin, taille directe ou indirecte, cela ne veut rien dire, c’est la chose faite qui compte. »

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Écrit par

  • : professeur d'histoire et de théorie de l'art contemporain, université de Paris VIII

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