CONTREFAÇON
Spécificités de la contrefaçon artistique et littéraire
Si, sous le terme contrefaçon, on désigne d'une manière très générale toutes les atteintes portées à des droits de propriété intellectuelle (brevets d'invention, marques de fabrique, dessins ou modèles), il semble plus approprié de parler de plagiat dans le cas d'atteintes à des droits d'auteur. Les techniques relevant du droit d'auteur sont en effet très particulières, notamment en raison de l'importance de l'aspect moral intégré par ce droit, dans la mesure où ce qui caractérise en premier lieu une œuvre littéraire ou artistique sera son originalité, quel que soit son mérite ou sa destination. C'est ici le simple fait de création qui importe, sans considération de l'utilité, qui est en revanche déterminante en propriété industrielle.
Les droits d'auteur
Si l'idée n'est pas protégeable, car elle germe dans tous les esprits, la mise en œuvre des idées est le résultat d'un travail de l'auteur sur lequel il a des droits.
Quels sont ces droits ?
– Un droit patrimonial dû pour toute édition, représentation, reproduction, diffusion ou mise à disposition du public. C'est un droit exclusif d'exploitation de l'œuvre qui est ainsi défini. Ce droit est protégé pendant la vie de l'auteur et les soixante-dix années qui suivent son décès (et non plus cinquante ans, durée retenue par la France et de nombreux autres États avant l'intervention d'une directive communautaire de 1993). Ce droit est cessible, dans des conditions réglementaires, moyennant rémunération, dans le cadre d'un contrat écrit.
– Un droit extrapatrimonial (ou moral), perpétuel et transmissible aux héritiers. Ce droit garantit à l'auteur le respect de l'intégrité de son œuvre, l'initiative de sa divulgation, la défense enfin de son nom. Il lui permet également de reprendre l'œuvre qu'il estime ne plus correspondre à son art. C'est le droit de repentir ou de retrait, moyennant indemnisation. Le droit moral de l'auteur sur son œuvre est un trait spécifique du droit d'auteur en France. Il n'existe pas dans le système anglo-saxon du copyright, qui ne considère les créations que sous l'angle de leur valeur marchande et ne consacre par conséquent que des droits patrimoniaux au profit de leurs auteurs.
La notion d'auteur
La qualité d'auteur est présumée appartenir à celui sous le nom de qui l'œuvre est divulguée, mais il convient de distinguer plusieurs cas. Lorsque plusieurs personnes ont concouru à la création de l'œuvre, elle est dite « de collaboration » ; elle est alors la propriété commune des auteurs, et, en cas de désaccord, il appartient à la juridiction civile de statuer (exemple : texte et dessins d'une bande dessinée). Lorsque l'œuvre incorpore une œuvre préexistante, elle est dite « composite » ; elle appartient à son auteur, sous réserve des droits de l'auteur de l'œuvre préexistante. Lorsque l'œuvre est créée sur l'initiative d'une personne qui la divulgue, mais que différents auteurs ont participé à sa réalisation sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun un droit distinct, elle est dite « collective » ; l'œuvre est alors présumée appartenir à la personne qui la divulgue.
La loi de 1985 a introduit, sous la notion de « droits voisins », la protection des droits des artistes-interprètes, des producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes, enfin des entreprises de communication audiovisuelle. L'artiste bénéficie du droit au respect de son nom et de son interprétation. Ce droit est inaliénable, imprescriptible et transmissible à ses héritiers. Toute reproduction ou communication est soumise à son autorisation. La signature d'un contrat entre l'artiste-interprète et le producteur[...]
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Écrit par
- Alain BLANCHOT : premier substitut, chef de la section économique, chargé d'enseignement de droit pénal à l'université de Paris-II
- Albert CHAVANNE : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Lyon
- Daniel HANGARD : directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle
Classification
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ART (L'art et son objet) - Le faux en art
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