CONTRÔLE CENTRAL DE L'APPÉTIT
Signaux circulant régulateurs de la satiété
On peut considérer que les mécanismes de contrôle de la prise alimentaire décrits jusqu’à ce point sont locaux et concernent l’axe cerveau-intestin. Cependant, ce contrôle s’exerce dans le cadre plus vaste de la physiologie générale d’un organisme, celui du contrôle hormonal et celui de la perception des propriétés des macronutriments (sensorialité buccale et viscérale).
Quelques acteurs de type hormonal
Certains signaux de cette intégration dans la physiologie générale sont de type hormonal. La théorie « lipostatique » propose qu’un signal circulant émanant du tissu adipeux peut directement contrôler le « point de consigne métabolique » et participer à l’orchestration de la balance entre apports et dépenses d’énergie. En effet, le tissu adipeux en sa qualité de tissu de stockage offre un très bon reflet de l’énergie disponible. Dans les années 1990, en recherchant les causes génétiques de l’obésité des souris porteuses de la mutation ob (pour obesity) – les homozygotes ob/ob peuvent peser deux fois le poids d’une souris normale –, on a identifié le gène codant pour une hormone, la leptine, produite par le tissu adipeux en proportion de sa masse. La mutation ou la dysfonction du gène ob se traduisent chez l’homme comme chez l’animal par une obésité massive avec augmentation de la taille des adipocytes associée à une hyperphagie et une baisse du métabolisme. D’un point de vue physiologique, le développement du tissu adipeux se traduit par une production et une libération croissante de leptine par ce dernier. La leptine est en cela une « adipokine » (hormone sécrétée par le tissu adipeux) dont les effets majeurs sont de réduire l’alimentation (effet satiétogène ou anorexigène) et de promouvoir une augmentation de la dépense énergétique. Elle a donc un effet de rétrocontrôle sur la prise alimentaire. L’absence de leptine a les effets inverses. Pour agir, la leptine doit atteindre des cibles neuronales spécifiques dans l’hypothalamus. Là, elle inhibe les neurones NPY/AgRP et active les neurones POMC et la libération de MSH qui va, via MCR4, réduire la prise alimentaire et augmenter la dépense énergétique ; ce qui, en retour, va initier une cascade d’événements synaptiques aboutissant à ces réponses adaptatives. En outre, la leptine a un effet majeur sur le métabolisme glucidique et le fonctionnement de la voie insulinique, ce qui contribue également aux réponses adaptatives.
Précisément, une autre hormone comme l’insuline, produite par le pancréas, a aussi la capacité à entrer dans le cerveau et à agir comme facteur diminuant l’appétit. Il en va de même de plusieurs autres facteurs circulants dont la découverte fait l’objet de recherche active dans le domaine. Parmi eux, la ghréline offre une image « en miroir » de la leptine, en cela que cette hormone est considérée comme une hormone orexigène (susceptible de stimuler la faim). La ghréline est une hormone peptidique sécrétée principalement par l’estomac endocrine. Les teneurs plasmatiques de ghréline sont à leur maximum avant un repas pour diminuer progressivement après la prise alimentaire. La ghréline agit sur le récepteur à l’hormone de croissance (GHS-R), qui active sa sécrétion. L’injection de ghréline augmente les sécrétions acides et la motilité gastrique, la sensation de faim et la prise alimentaire. La leptine, la ghréline et l’insuline ont de multiples territoires d’action au niveau du cerveau, mais chacune de ces hormones a la capacité de moduler directement les neurones NPY/AgRP et POMC.
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Écrit par
- Serge LUQUET : directeur de recherche CNRS, université Paris Cité
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Médias