Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

CORÉE Arts

Art moderne et contemporain

Les notions qui permettent de penser l'évolution artistique au xxe siècle en Occident ne s'appliquent qu'imparfaitement à l'histoire de l'art coréen. Ainsi, avant la fin de la dynastie des Yi et l'occupation japonaise en 1910, la péninsule protège son intégrité vis-à-vis des tentatives d'incursion étrangères, qu'elles soient politiques, économiques ou culturelles. Dans ce contexte, la peinture à l'occidentale constitue un apport artistique exogène introduit par le Japon, la puissance coloniale voisine. Il faut mesurer la rupture engendrée par la technique de la peinture à l'huile, par l'emploi d'une toile tendue sur un châssis, par le recours à la perspective classique, au modelé, mais aussi par l'idéologie de l'artiste-démiurge dans un univers où l'on pratiquait la peinture à l'encre ou à l'eau, sur du papier de riz ou de mûrier et où l'artiste devait s'effacer devant son sujet. Cette scission s'exprime dans le vocabulaire coréen qui distingue, depuis cette époque, la « peinture occidentale » (seo yang-hwa) de la « peinture orientale » (dong yang-hwa), les deux systèmes artistiques coexistant parallèlement tout en nourrissant des points de contacts. Cette double dimension, l'une moderne et occidentale, l'autre traditionnelle et coréenne, marque d'ailleurs tous les aspects de la civilisation coréenne, qu'il s'agisse de la cuisine, du vêtement ou de l'habitat. L'art moderne coréen procède donc d'un mouvement d'accès à la création occidentale par l'intermédiaire du Japon – qui est aussi une réaction contre ce pays – puis, à partir de 1945, d'une confrontation directe avec les foyers européen et américain. L'histoire de l'art moderne coréen balance entre l'expression d'une appartenance à une culture inaliénable et farouchement revendiquée et l'appropriation de techniques et de problématiques artistiques importées. Après avoir évoqué le premier art moderne qui se développe dans l'ensemble du pays jusqu'au début de la guerre civile en 1950, nous nous attacherons à décrire la situation artistique dans la Corée du Sud, la Corée du Nord, née de la séparation de 1953, ne laissant filtrer aucune information à cet égard.

Aux sources de la modernité artistique

Pionnier de la peinture à l'occidentale, Ko Hee-dong l'a étudiée dès 1909 à l'École des beaux-arts de Tōkyō. La voie de la modernité tentera une pléiade d'artistes qui s'inspirent principalement de l'École de Paris. Certains font d'ailleurs le voyage vers l'Europe, tel Yi Chong-u, qui vient en France dès 1925 et expose à Paris au Salon d'automne de 1927. Le réalisme poétique imprègne les œuvres d'un artiste comme Ku Bong-ung tandis que Yi Choong-sup adopte un expressionnisme dont les accents romantiques indiquent un changement radical dans la conception de l'art et dans le rôle social de l'artiste. La Société des calligraphes et peintres, première organisation professionnelle de ce type en Corée, est créée en 1919, puis, en 1922 débute à Séoul l'Exposition artistique Choson, manifestation annuelle organisée par le gouvernement général japonais dont le nom fait allusion à l'entité nationale ancestrale du pays. Ni le cubisme ni le surréalisme ne tentent les artistes coréens et les années 1930 et 1940 voient se confirmer la recherche d'une représentation postimpressionniste dans laquelle l'idéalisme des paysages et des figures tient à distance la réalité sociale et politique. Cependant, l'omniprésence des scènes de la vie rurale exprime avec discrétion le nationalisme blessé.

La guerre civile et ses conséquences

L'indépendance du pays, en 1945, bouleverse la vie artistique[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : chercheuse en archéologie coréenne (CNRS, U.R.A. no 1474, études coréennes)
  • : écrivain, docteur en histoire de l'art
  • : ancien maître de recherche au CNRS, professeure honoraire à l'École du Louvre, chargée de mission au Musée national des arts asiatiques-Guimet

Classification

Médias

Bodhisattva assis, art coréen - crédits :  Bridgeman Images

Bodhisattva assis, art coréen

Vase à eau lustrale (kundika), art coréen - crédits :  Bridgeman Images

Vase à eau lustrale (kundika), art coréen

Palais Kyongbok à Séoul (Corée) - crédits : John Elk III/ The Image Bank/ Getty Images

Palais Kyongbok à Séoul (Corée)

Autres références

  • CORÉES - Du rapprochement à la défiance

    • Écrit par
    • 2 921 mots

    Les sociétés nord et sud-coréennes, confrontées en 2008 à la crise financière internationale comme le reste du monde, étaient déjà en proie à des incertitudes et à des difficultés économiques, politiques et sociales différentes, mais non pas moins cruciales. La crise larvée de part et d'autre du 38...

  • ASIE (Structure et milieu) - Géographie physique

    • Écrit par , et
    • 34 872 mots
    • 8 médias
    La péninsule coréenne comprend à la fois des éléments de socle et de pseudo-socle. Le socle précambrien, déjà représenté au nord par les Changbaishan et leur prolongement, le plateau de Kaima, se trouve au centre dans la région drainée par le Han, ainsi que dans le sud où il affleure dans la chaîne diagonale...
  • ASIE (Géographie humaine et régionale) - Dynamiques régionales

    • Écrit par , , , et
    • 24 799 mots
    • 10 médias
    LaCorée est traditionnellement nommée le « Pays de l'Orient » (en chinois Dongguo, en coréen Dongkuk) par les Chinois. Prise en tenaille entre les deux grands voisins chinois et japonais, ses monarchies ont versé le tribut à l'Empire chinois jusqu'à la fin du xixe siècle, puis...
  • BOUDDHISME (Histoire) - L'expansion

    • Écrit par
    • 3 116 mots
    • 4 médias
    La Corée était au ive siècle de notre ère morcelée en plusieurs royaumes, dont les principaux sont le Ko-kou-rye au nord-ouest, le Paik-tchei au sud-ouest, et le Sillā au sud-est.
  • BOUDDHISME (Les grandes traditions) - Bouddhisme japonais

    • Écrit par
    • 13 492 mots
    • 1 média
    La première communauté était formée de moines coréens : neuf furent envoyés de Paekche en 554 ; ils venaient de remplacer sept autres, qui se trouvaient donc au Japon avant eux ; cela implique qu'il existait des moines qui s'occupaient sans doute exclusivement des immigrés. En 577, six autres religieux...
  • Afficher les 32 références