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CORÉE Cinéma

La vague coréenne

Les années 1990 voient en Corée la fin du système traditionnel de production avec l'arrivée des chaebols, conglomérats de grandes sociétés (Samsung, Hyundai, Daewoo) qui investissent dans le cinéma. Ils se désistent après la crise économique de 1997 et seront relayés par les banques. Les chaebols auront entre temps donné naissance à un nouveau cinéma commercial, réalisé par de jeunes metteurs en scène à l'intention d'un jeune public urbanisé. Si la production se stabilise à 80 films par an, après une chute à 43 en 1998 en raison de la crise économique, la part de marché du cinéma coréen ne cesse d'augmenter. Elle passe de 20,9 p. 100 en 1995 à 59,3 p. 100 en 2004. L'industrie du cinéma américain, en faisant pression auprès du gouvernement, a eu raison des quotas qui ont été supprimés dans un contexte d'euphorie pour le cinéma coréen (plus de 60 p. 100 de part de marché en 2005). Parmi les dix plus gros succès au box-office en 2005, on dénombrait 8 films coréens et seulement 2 films américains aux 5e et 6e rangs. De Shiri(1999) de Kang Je-gyu, qui a dépassé les entrées de Titanic, à Silmidode Kang Woo-suk (2003), en passant par J.S.A. (Joint Security Area, 2000) de Park Chan-wook (né en 1963), plusieurs films mettent en scène le conflit entre le Sud et le Nord, drame national aux blessures toujours vives, par le biais de thrillers sur fond d'espionnage ou de films de guerre. Au cours des années 1990 se propage le terme hallyu, « vague coréenne », qui désigne la mode des produits pop et culturels coréens en Asie puis en Occident.

Ce contexte a permis l'éclosion de nombreux réalisateurs. Kim Ki-duk (né en 1960), autodictate issu d'un milieu populaire, s'est fait connaître à l'étranger avec L'Île (2000). Son œuvre, variée, inégale, sombre parfois dans une surenchère systématique, qui entache la portée politique de ses films (The CoastGuard, 2002). Il cultive aussi une veine mystique et connaît un grand succès international en 2003 avec le film bouddhiste Printemps, été, automne, hiver… et printemps. Lee Chang-dong (né en 1954), ancien romancier et scénariste, s'est fait remarquer avec son second long-métrage Peppermint Candy (2000) qui retrace le destin de ses personnages de la dictature militaire à la crise de 1997, puis avec Oasis (2002). Nommé ministre de la Culture, il reprend en 2006 ses activités de cinéaste et réalise trois films majeurs : Secret Sunshine (2007), Poetry (2010), Burning (2018). Observateur du comportement humain et des relations complexes entre hommes et femmes souvent vouées à l'échec, Hong Sang-soo (né en 1960) est certainement le cinéaste le plus prolifique de sa génération. Tous ses films, qu'il s'agisse de La Province de Kangwon (1998), TurningGate (2002) ou Conte de cinéma (2005), jouent du labyrinthe du temps, des dédales du cheminement amoureux, de la répétition monotone du quotidien et ses petites variations. Ils font de l'ordinaire de l'activité humaine (boire de l'alcool, parler, faire l'amour) un drame existentiel à la mélancolie burlesque. Au cours des années 2010, son travail évolue vers des budgets de plus en plus restreints, des récits et une esthétique épurés jusqu’au minimalisme (Un jour avec, un jour sans, 2015 ; Seule sur une plage la nuit, 2017…).

De nombreuses récompenses prestigieuses ont salué la renaissance du cinéma sud-coréen. Prix de la mise en scène au festival de Cannes 2002 (Ivre de femmes et de peinture de Im Kwon-taek), grand prix du jury au festival de Cannes 2004 (Old Boy de Park Chan-wook), Lion d’or au festival de Venise 2012 (Pietà, de Kim Ki-duk). Un parcours couronné par la palme d’or 2019 remise à Parasite de Bong Joon-ho (né en 1969). Cette ouverture à l’international offre l’occasion aux comédiens, techniciens et cinéastes[...]

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Écrit par

  • : journaliste
  • : critique de cinéma, maître de conférences en histoire et esthétique de cinéma, université de Paris-III-Sorbonne nouvelle

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