CORPORATE FINANCING AND INVESTMENT DECISIONS WHEN FIRMS HAVE INFORMATION THAT INVESTORS DO NOT HAVE, S. Myers et N. Majluf Fiche de lecture
Stewart C. Myers et Nicholas S. Majluf publient en 1984 un article novateur dans le domaine de la finance d’entreprise, intitulé « Corporate financing and investment decisions when firms have information that investors do not have » (Le financement des entreprises et les décisions d’investissement lorsque les sociétés détiennent des informations que les investisseurs ne possèdent pas). Dans le cadre d'un modèle de signal issu de l’économie de l’information, Myers et Majluf analysent l'interdépendance des décisions d'investissement et de financement de l’entreprise. Ils refusent l'analyse en termes d'information parfaite, et supposent au contraire l'existence d'asymétries d'information entre le dirigeant de l'entreprise et les actionnaires, en place ou potentiels.
Asymétrie d'information et structure financière de l’entreprise
Sous l'hypothèse d’une information asymétrique entre dirigeant et actionnaires, le résultat théorique majeur de Myers et Majluf est qu'une entreprise peut être amenée à renoncer à de nouveaux projets d'investissement, a priori rentables (dont la valeur actualisée nette est positive), si elle est pour cela contrainte à une augmentation de capital (émission d’actions). La structure financière de l'entreprise n'est pas neutre, et l'impact du projet d'investissement sur celle-ci doit être pris en compte. Les agents peuvent, en effet, inférer les informations privées détenues par le dirigeant à partir des décisions de financement (autofinancement, émission d’obligations, d’actions, etc.) qu’il prend et qui modifient la structure financière de l'entreprise (la composition de son passif).
Myers et Majluf considèrent un dirigeant d'entreprise qui envisage de lancer un projet d'investissement. Pour ce faire, il est contraint de recourir à une augmentation de capital, les ressources financières propres de l'entreprise étant insuffisantes. De nouveaux actionnaires accèdent par conséquent au capital de la société, et l'on assiste à une dilution du capital détenu par les anciens actionnaires. Les auteurs supposent que seul le dirigeant connaît la rentabilité exacte du projet d'investissement et la véritable valeur de l'entreprise. En outre, tous les investisseurs sont conscients de cette asymétrie d'information et savent que le dirigeant agit dans l'intérêt des actionnaires en place. L’asymétrie d’information n’affecte donc pas la relation entre actionnaires en place et dirigeant, mais, par contre, un conflit d’intérêt oppose les actionnaires en place et les nouveaux investisseurs.
La valorisation boursière de l'actif incorpore toute l'information publique disponible. Cependant, l'information privée détenue par le dirigeant est telle qu'en réalité la véritable valeur de l'actif est inférieure au cours du marché (surévaluation du cours des titres) ou supérieure (sous-évaluation du cours des titres). Dans le cas où le cours des titres est sous-évalué, si le dirigeant décide d’émettre des actions, celles-ci le sont à un prix trop faible par rapport à leur véritable valeur. Les nouveaux actionnaires captent donc une partie de la richesse de l'entreprise d'autant plus grande que la valeur boursière est éloignée de la véritable valeur de l’actif ou, autrement dit, que l'asymétrie d'information est forte. Si la rentabilité future du projet n'est pas suffisamment importante pour compenser la perte de richesse des anciens actionnaires liée à la dilution du capital, alors le projet d'investissement est abandonné, et ce malgré une valeur actualisée nette positive du projet.
En revanche, en cas de surévaluation du cours des titres, les actionnaires anciens devraient voir leur richesse s'accroître si l'entreprise investit dans[...]
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Écrit par
- Nicolas COUDERC : enseignant, chercheur à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne (T.E.A.M.-C.N.R.S.)
- Séverine VANDELANOITE : adjointe au chef du pôle d'analyse économique du secteur financier, direction générale du Trésor et de la Politique économique, ministère de l'Économie, chercheuse associée au G.A.T.E.-C.N.R.S., université de Lyon-II-Lumière
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