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COSMOLOGIE

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Les modèles cosmologiques

Les équations de Friedmann

L'hypothèse d'homogénéité permet de prévoir la structure de l'Univers d'après son contenu, à condition de décrire ce dernier d'une manière simple, sous forme de ce qu'on appelle un fluide parfait, c'est-à-dire dont les seules propriétés intéressantes (du point de vue de la dynamique de l'Univers) se réduisent à sa densité et à sa pression (les mêmes en tout point puisque l'Univers est supposé homogène). Dans un tel cas, le tenseur d'énergie-impulsion prend une forme simple et les équations d'Einstein se réduisent à un ensemble de deux équations différentielles (par rapport au temps) qui permettent en principe de calculer le facteur d'échelle R(t) et la valeur de k en fonction de la densité ρ et de la pression p du « fluide cosmique », ainsi qu'en fonction d'un paramètre supplémentaire qui s'introduit dans les équations, la constante cosmologique Λ. Ainsi, la connaissance de ces trois paramètres permet de déterminer la structure, la géométrie et la dynamique de l'Univers par l'intermédiaire de la métrique de Robertson-Walker.

Aujourd'hui, par exemple (en fait depuis quelques milliards d'années), l'Univers peut être considéré comme sans pression. En effet, le terme qui correspondrait à une pression pour le « gaz d'étoiles et de galaxies » qui remplit l'Univers apporte une contribution négligeable à sa dynamique. Les équations se simplifient et peuvent se résoudre : la densité de masse se dilue comme R—3 tandis que le facteur d'échelle R varie lui-même en fonction du temps, approximativement comme t2/3. En revanche, beaucoup plus tôt dans son histoire, l'Univers était dominé par le rayonnement électromagnétique, dont la pression jouait un rôle dynamique comparable à celui de la densité. Pendant une telle « ère du rayonnement », la densité se diluait comme R—4 et le facteur d'échelle grandissait comme t1/2, la température diminuant comme 1/R.

Solutions particulières

Modèles d'Univers de Friedmann - crédits : Encyclopædia Universalis France

Modèles d'Univers de Friedmann

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Les solutions se distinguent par les valeurs des paramètres cosmiques. Parmi elles, celles d'un Univers vide (p = ρ = 0) ou stationnaire (où aucune grandeur ne varie avec le temps) présentent plutôt un intérêt historique car elles ne semblent pas correspondre à la réalité.

La forme de la métrique nous a montré que k s'interprétait comme une courbure. Mais, parmi toutes les surfaces possibles, il en existe une et une seule – le plan – sans courbure. Il en est de même à trois ou à quatre dimensions. Il existe une possibilité pour que l'espace soit sans courbure (euclidien), correspondant à la valeur k = 0 du paramètre de courbure.

Un modèle d'Univers particulier, où l'espace est plat, est souvent utilisé comme référence et porte le nom de ses créateurs : Einstein-de Sitter. Il suppose la constante cosmologique nulle, et une valeur particulière de la densité, dite densité critique, qui s'exprime en fonction de H0, valeur de H au temps cosmique actuel :

ρcritique avoisine 2 . 10—29 g . cm—3. Cette valeur est utilisée comme unité pour exprimer la densité de l'Univers, qui s'écrit alors : Ω = ρ/ρcritique. Dans ce modèle, le paramètre de décélération q0 (qui mesure la décélération de l'expansion universelle ou, si l'on préfère, la variation du paramètre de Hubble H avec le temps) prend la valeur 1/2 ; le facteur d'échelle R croît exactement comme t2/3. Les observations nous indiquent que ce modèle ne décrit pas parfaitement notre Univers. Mais sa simplicité en fait une sorte d'archétype des modèles de big bang, que les cosmologues utilisent souvent à des fins illustratives ou pédagogiques. La géométrie et la dynamique des modèles de big bang plus réalistes ne diffèrent en effet pas trop de ce cas particulier idéal.

La densité de l'Univers

La densité de matière que contient l'Univers apparaît comme un paramètre crucial pour déterminer son évolution. Ce qui n'est pas surprenant car l'Univers évolue sous l'effet de sa propre masse : plus sa densité est élevée, plus il exerce d'attraction gravitationnelle sur lui-même et plus son expansion doit se ralentir.

La matière se présente essentiellement sous des formes répertoriées : étoiles brillantes (faites de gaz très chaud) réunies sous forme de galaxies, gaz, poussière, planètes, etc. On peut estimer les masses de ces objets et, par simple dénombrement, déduire leur contribution à la densité de l'Univers. Ces estimations sont entachées d'énormes incertitudes, mais il semble que la densité (visible) soit de l'ordre de 5 . 10—31 g . cm—3, soit un centième environ de ρcritique.

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Cependant, l'analyse dynamique des galaxies ou des amas de galaxies et leurs modèles de formation laissent à penser qu'il existe davantage de masse que ce que nous voyons, sous la forme de ce que les astrophysiciens appellent de la masse cachée. Les quantités en jeu atteindraient 0,2 fois la valeur critique. L'Univers serait donc à courbure négative, d'extension spatiale infinie, et destiné à une expansion éternelle.

Mais certains astrophysiciens se refusent à croire que ce puisse être le cas : ils « voudraient » que l'Univers soit fini, à courbure spatiale nulle, donc que Ω soit égal à 1. Ils sont obligés de supposer alors l'existence de quantités encore plus élevées de masse cachée, sous une forme inconnue, invisible. La question est fortement débattue car une telle hypothèse conduit à envisager notre Univers comme dominé par une espèce de particules encore inconnue. Les astrophysiciens ont cru quelque temps que les neutrinos pourraient jouer ce rôle, mais leurs espoirs ont été déçus ; la physique des particules permet néanmoins d'envisager de nombreuses espèces de particules nouvelles qui pourraient remplir ce rôle. Le débat n'est pas clos. Aujourd'hui, divers arguments semblent exclure une valeur aussi élevée que Ω = 1. Néanmoins, il est bon de rappeler la possibilité que la constante cosmologique ne soit pas nulle et que, de ce fait, la courbure de l'espace puisse être nule, même si Ω est inférieur à 1.

La constante cosmologique et l'âge de l'Univers

Faute d'avoir pu mesurer avec précision la densité de l'Univers, nous ne savons pas quel est le bon modèle cosmologique pour le décrire. En admettant que nous ayons raison de supposer l'Univers homogène, restent à postuler les valeurs de H, de q0, de Λ, de Ω, liées entre elles par la relation :

La connaissance de ces paramètres (en principe mesurables) nous fournirait l' âge de l'Univers, son rayon de courbure, son caractère fini ou non, son destin, etc. Elle nous permettrait aussi de convertir les décalages mesurés en distances ou durées.

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Parmi les paramètres mentionnés, la constante cosmologique Λ joue un rôle particulier car elle détermine la dynamique sans se référer à son contenu. Il s'agit d'une situation conceptuellement insatisfaisante, contraire à un des aspects positifs de la relativité générale, selon lequel ce serait le contenu matériel seul qui déterminerait la dynamique. Pour cette raison, certains cosmologues pensent que cette constante ne devrait pas être prise en compte, autrement dit qu'elle devrait être nulle. C'était par exemple l'avis d'Einstein, qui l'introduisit pourtant dans les équations en remarquant qu'elle seule permettait de concevoir des modèles d'Univers stationnaires. Aujourd'hui, on sait (par l'observation) que l'Univers n'est pas stationnaire et cet argument ne s'applique plus. Les partisans d'une constante cosmologique nulle pourraient cependant être mis en difficulté par un autre argument lié à l'âge de l'Univers.

Les modèles cosmologiques prévoient pour l'Univers un âge (temps écoulé depuis la singularité initiale) inférieur au temps de Hubble = H0—1, si la constante cosmologique est nulle. Pour concilier l'âge des étoiles les plus anciennes connues (de l'ordre de 14 milliards d'années) avec les estimations de H0, il semble nécessaire de faire intervenir une valeur non nulle de Λ. Par ailleurs, pour une valeur donnée de la constante cosmologique, l'âge de l'Univers est d'autant plus élevé que la densité de l'Univers est faible. Un âge élevé favorise ainsi les modèles à faible densité. Une valeur Ω = 1 semble en tout cas aujourd'hui exclue par les observations.

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École nationale supérieure de la rue d'Ulm, docteur en physique, directeur de recherche émérite au CNRS

Classification

Médias

Structure de l'Univers - crédits : Encyclopædia Universalis France

Structure de l'Univers

Edwin Powell Hubble - crédits : The Observatories of the Carnegie Institution of Washington

Edwin Powell Hubble

Évolution de l'Univers pour les trois courbures de l'espace-temps possibles - crédits : Encyclopædia Universalis France

Évolution de l'Univers pour les trois courbures de l'espace-temps possibles

Autres références

  • UNIVERS

    • Écrit par et
    • 6 652 mots
    • 18 médias

    Il peut paraître illusoire, inutile ou présomptueux d'oser consacrer quelques lignes à l'Univers dans son ensemble. Nous sommes écrasés par son immensité et sa diversité. Néanmoins, l'intelligence de l'homme l'a conduit à inventer un très grand nombre de techniques qui lui permettent d'appréhender...

  • ÂGE DE LA TERRE

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    Que la Terre et même l’Univers aient un âge est de nos jours une évidence. Le fait que ces âges se comptent par milliards d’années est lui-même couramment connu : 4,55 pour la Terre et sans doute environ trois fois plus pour l’Univers, comme l’ont respectivement établi les géochimistes au milieu du...

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    L' anthropocentrisme a connu un tournant décisif à l'époque de la Renaissance. Jusqu'à Copernic (1473-1543), les « systèmes du monde » étaient explicitement centrés sur la Terre. Qu'elle fût considérée comme « centrale » ou comme « inférieure », la position occupée par l'homme possédait un caractère...

  • ANTIMATIÈRE

    • Écrit par et
    • 6 934 mots
    • 4 médias
    ...exister. Le problème est de savoir s'il y a réellement de l'antimatière en abondance dans l'Univers. Les interrogations à ce sujet viennent en fait de la cosmologie, qui est la science qui spécule sur la naissance et l'évolution du monde. Les modèles de cosmologie ont en commun une explosion initiale, le...
  • ASTRONOMIE

    • Écrit par
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    ...établit aussi, en même temps que l e Belge Georges Lemaître (1894-1966), la relation entre le décalage vers le rouge de la lumière des galaxies et leur distance, qu'ils attribuèrent à une expansion générale de l'Univers. Ainsi naissait véritablement la cosmologie observationnelle.
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Voir aussi