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COURS D'INTRODUCTION À LA PHILOSOPHIE DE LA MYTHOLOGIE (F. W. J. von Schelling)

Longtemps ignorée en France, car suspectée d'irrationalisme, la « dernière philosophie » de Schelling commence à être mieux connue. C'est ainsi qu'une équipe (G.D.R. Schellingiana-C.N.R.S.) entraînée par Jean-François Courtine et Jean-François Marquet a proposé une nouvelle version du Cours d'introduction à la philosophie de la mythologie (Gallimard, 1998), initialement traduit par Samuel Jankélévitch (en 1946), tandis que Alain Pernet a traduit aux éditions Jérôme Millon les Leçons inédites sur la philosophie de la mythologie (1997). Certes, les travaux du père Xavier Tilliette, de Miklos Vetö et des traducteurs susnommés avaient déjà permis d'y voir plus clair dans le gigantesque chantier d'une pensée qui ne cessa de chercher ses formulations au cours d'une très longue carrière (né en 1775, Schelling meurt en 1854). L'omniprésence de la mythologie, ou de la religion en général, dans l'itinéraire du penseur, fait plus qu'attester une curiosité pour un objet particulier : la réflexion sur la mythologie est consubstantielle aux ambitions d'une pensée tout entière mue par le désir de trouver, sous les constructions de l'esprit les plus sophistiquées qu'offre la philosophie depuis Platon et Aristote, un « acte pur d'exister » qui soit irréductible à tout englobement dans les spéculations de la raison.

Constituer une « philosophie de la mythologie » est une entreprise qui peut sembler paradoxale si l'on se rappelle l'hostilité des philosophes tant grecs que chrétiens, sans parler de la philosophie des Lumières, à l'égard de la mythologie. Schelling consacrera les dix premières leçons (Introduction historico-critique), données à Munich de 1827 jusqu'en 1841 et reprises à Berlin de 1841 à 1846, à essayer d'en dégager la nécessité et d'en décrire les méthodes. C'est cette introduction que l'on retrouve avant tout développée dans les versions de deux cours inédits donnés à Munich en 1836 et à Berlin en 1842, et publiés pour la première fois en 1996. C'est encore à ce texte qu'Ernst Cassirer se référera avec admiration pour asseoir scientifiquement une « philosophie de la mythologie » dans le second volume de La Philosophie des formes symboliques.

La philosophie de la mythologie n'est pas une philosophie sur la mythologie, elle ne cherche pas non plus à tirer une philosophie de la mythologie, ni à appliquer une philosophie à la mythologie. Plus modestement, en apparence, elle veut laisser la mythologie se déployer et dire sa vérité sans aucunement la référer à des causes extérieures, qu'elles soient naturelles ou transcendantes. L'auteur se livre à une critique fort précise de toutes les interprétations allégorisantes (évhéméristes, naturalistes ou poétiques) des mythes, qui ont pour point commun de rapporter la teneur des discours mythologiques à autre chose qu'elle-même. Trois grands groupes d'interprétations sont passés au crible : celle qui refuse toute vérité à la mythologie (soit parce qu'elle ne serait que poésie, soit parce qu'elle serait absurde et « engendrée par l'ignorance »), celle qui consent à voir en elle une certaine part de vérité (soit comme « le vêtement et l'enveloppe » d'une vérité historique ou d'une vérité physique, soit comme « la mécompréhension ou la déformation » d'une vérité scientifique ou d'une vérité religieuse), enfin, celle, proprement schellingienne, qui dit que « dans la mythologie comme telle, comme processus, comme polythéisme successif, il y a de la vérité ». Dans la huitième leçon, Schelling introduit la notion de tautégorie empruntée au poète britannique Coleridge : « la mythologie n'est pas allégorique, elle est tautégorique. Pour elle, les dieux sont des êtres qui[...]

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