COURS DE PHILOSOPHIE POSITIVE, Auguste Comte Fiche de lecture
La sociologie, entre raison et intuition
Cette somme tient son originalité intrinsèque à la prétention naturelle de la sociologie, comme science, à tirer sa légitimité tant théorique que pratique de l'imbrication, au fondement même des conditions de possibilité du positivisme, d'une théorie de l'histoire et d'une théorie de la connaissance. En effet, l'une la soumet à une règle diachronique de développement, l'autre à un principe synchronique d'organisation.
La fameuse loi des trois états justifie d'abord l'apparition tardive de la sociologie en rattachant la construction du rapport au réel à la nature de l'esprit humain, ce dernier passant, selon un ordre nécessaire de progression, d'un savoir intuitif porté sur les substances, les causes et forces surnaturelles à l'étude des relations empiriquement observées et exprimées par des lois. La classification des sciences, pour sa part, permet à chacune de repérer leur niveau respectif d'investigation de la réalité et donc d'établir, sur la base de la supériorité de la théorie sur la pratique, du spéculatif sur le concret, leur hiérarchie, des mathématiques à la sociologie. Mais la série s'inverse, ou du moins l'antériorité des premières s'explique dès que l'on retient comme critère la complexité croissante des objets qui imposent le recours pour la seconde à une méthode synthétique privilégiant le tout sur la partie.
Ainsi y a-t-il un ordre et un progrès, une statique et une dynamique que les leçons de sociologie du Cours enregistrent, à travers les influences conjuguées du Romantisme et des Lumières, de Condorcet et de Montesquieu d'un côté, de Bonald et de Maistre de l'autre. La promotion assurée de l'esprit positif oriente l'ensemble vers un providentialisme proche de Bossuet, visible dans le thème de l'unification des sociétés dans un état définitif.
Bien que ses conceptions déterministes et holistes établissent des parentés certaines avec le courant durkheimien, le Cours restera, pour son prophétisme et l'irréalisme de la synthèse qu'il s'assigne comme but, une vue théorique invitant simplement une nouvelle scientificité à se construire.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Éric LETONTURIER : docteur en sociologie, D.E.A. de philosophie, maître de conférences à l'université de Paris V-Sorbonne
Classification
Média
Autres références
-
COMTE AUGUSTE (1798-1857)
- Écrit par Bernard GUILLEMAIN
- 9 502 mots
- 1 média
En ouvrant la conclusion totale du Système de politique positive, Auguste Comte distingue dans sa vie intellectuelle deux carrières. Dans la première, qui correspond à peu près à l'élaboration du Cours de philosophie positive, il s'est efforcé de transformer la science en philosophie. Dans...
-
ESTHÉTIQUE - Histoire
- Écrit par Daniel CHARLES
- 11 892 mots
- 3 médias
C'est, dans l'ensemble, à Auguste Comte que l'on doit faire remonter cette tendance. Le Cours de philosophie positive n'enseignait-il pas, dès 1842, que « le caractère profondément synthétique qui distingue surtout la contemplation esthétique, toujours relative aux émotions de l'homme,... -
POSITIVISME
- Écrit par Angèle KREMER-MARIETTI
- 5 236 mots
- 2 médias
...positivisme étudie le passage de l'abstrait au concret, l'application de cette philosophie tirée des sciences positives sous l'ascendant de la sociologie : c'est ici que les vues d'Auguste Comte subissent de légères dérivations selon qu'on les considère au temps des « programmes » que celui-ci... -
POSITIVISME, notion de
- Écrit par Jean LECLERCQ
- 1 384 mots
De telles inflexions obligent à parler d'un positivisme historique,celui de Comte et de son Cours de philosophie positive (1830-1842), auquel il convient de revenir, mais sans pratiquer un réductionnisme historique, qui s'efforce de concilier une histoire dynamique de la philosophie et une philosophie...