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CRÉATIONNISME

Les diverses conceptions créationnistes débattues au cours de l'histoire occidentale (mais pas seulement) trouvent un point de convergence dans l'idée que l'Univers, la Terre et les êtres vivants doivent leur existence à la volonté de Dieu. Elles s'opposent ainsi, de façon générale, aux conceptions matérialistes. Dans sa version fixiste, qui est la plus connue et se fonde notamment sur une lecture littérale de la Bible, le créationnisme s'oppose à l'évolutionnisme et considère que les différentes espèces vivantes elles-mêmes ont été créées.

La thèse d'une production de la vie par une série de causes matérielles spécifiques et d'une transformation progressive des organismes – pour s'adapter à des changements climatiques ou géologiques – s'est imposée à partir de la fin du xviie et au xviiie siècle. À cette époque, des auteurs classiques comme Lucrèce, ou des champions de la littérature clandestine comme Benoît de Maillet (dont l'ouvrage posthume, Telliamed, fut imprimé pour la première fois en 1748), étaient souvent cités pour critiquer le récit de la Genèse et la thèse que l'ordre naturel émanait de la volonté et de l'action créatrice de Dieu. L'idée que tous les organismes vivants sont le résultat d'une action directe de la divinité n'est donc pas si ancienne que certains le prétendent. Auparavant, dans la tradition chrétienne d'avant la Réforme, surtout chez les auteurs scolastiques, ainsi que dans la pensée naturaliste classique, on considérait comme acquis que plusieurs types d'animaux et de plantes (vers, serpents, ou lichens) étaient spontanément générés dans les terres humides ou les eaux.

Vers la fin du xviiie siècle et au début du xixe, la parution des premières thèses transformistes modernes (Jean-Baptiste Lamarck, Erasmus Darwin, Bory de Saint-Vincent...), qui étaient vues comme des expressions d'une pensée athée, socialement et politiquement dangereuse (le matérialisme scientifique était tenu pour l'une des causes de la Révolution française et de l'insubordination sociale), contribua dans plusieurs pays au développement d'un créationnisme scientifique et religieux. En France, des épigones de Cuvier, moins prudents que leur maître, établirent la prétendue succession de créations et de destructions qui avaient marqué l'histoire de la vie sur Terre. En Angleterre, une partie considérable de la vaste et complexe littérature sur la « théologie naturelle » invitait à considérer la pluralité des formes de vie connues comme des preuves de la puissance et bienveillance divine.

Dans la seconde moitié du xixe siècle et la première du xxe siècle, plusieurs confessions chrétiennes préféraient éviter un conflit ouvert avec les théories scientifiques, en particulier avec les théories cosmologiques ou évolutionnistes. Au fond, et en premier lieu dans le monde catholique, on n'acceptait pas les données des sciences contemporaines et on s'appuyait plutôt sur des tentatives de conciliation entre science et religion. Ainsi, l'opposition aux doctrines darwiniennes s'articulait sur des interprétations finalistes des processus évolutifs, proposées parfois par d'éminents scientifiques catholiques. Dans les pays où les autorités religieuses exerçaient un certain contrôle sur l'éducation ou la politique, on insistait sur le caractère transitoire, hypothétique des théories scientifiques, en leur opposant le statut éternel des vérités du message religieux et de ses élaborations théoriques ou doctrinaires. Il n'est donc pas surprenant de constater que les conciliations entre biologie évolutionniste et religion, proposées par des savants catholiques tels que Teilhard de Chardin en France, furent regardées avec suspicion par les autorités religieuses.

Le terme « créationnisme[...]

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Écrit par

  • : professeur des Universités, université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales

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