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CRISE DES SUBPRIMES

Une crise du capitalisme financier

La crise qui a débuté en 2007 va au-delà d'un dérèglement de la finance et revêt une dimension systémique. Il s'agit en effet d'une crise globale du système économique dominant. Plusieurs facteurs sous-tendent cette troisième conclusion. En premier lieu, cette crise a frappé en priorité les pays les plus avancés de la planète, à commencer par les États-Unis, qui constituent le centre du capitalisme mondial. C'est là une différence majeure avec les crises financières des années 1990 qui avaient principalement ébranlé les pays de la périphérie nouvellement ouverts à la finance internationale, souvent qualifiés de « marchés émergents ». En second lieu, la crise qui a débuté en 2007 résulte des contradictions internes du régime de croissance qui s'est mis en place dans les pays avancés à partir des années 1980, et que les économistes ont qualifié de capitalisme financier mondialisé. En Europe, les pays les plus ébranlés par la crise sont ceux dont les caractéristiques se rapprochent le plus du capitalisme financier tel qu'il fonctionne aux États-Unis, en particulier le Royaume-Uni, l'Espagne ou l'Irlande. Les caractéristiques communes à ces différents pays sont notamment l'importance des secteurs immobiliers (30 p. 100 du P.I.B. en Irlande, 11 p. 100 du P.I.B. en Espagne), l'hypertrophie de systèmes financiers largement dérégulés, ainsi que le niveau très élevé d'endettement des ménages.

Le fonctionnement du capitalisme financier et mondialisé à l'échelle internationale peut être caractérisé de la manière suivante : la mondialisation néolibérale, fondée sur la libre circulation des marchandises et des capitaux, a mis en concurrence les travailleurs des pays riches et des pays en développement, pesant ainsi sur les salaires dans les pays avancés ; le partage de la valeur ajoutée s'est déplacé dans la plupart des pays en faveur des profits et au détriment des rémunérations salariales ; par ailleurs, le partage des profits s'est modifié en faveur des actionnaires, au détriment de l'épargne (autofinancement) des entreprises. Les détenteurs du capital financier sont les grands bénéficiaires de cette nouvelle répartition des richesses, ce qui a contribué à creuser les inégalités au profit d'une minorité de ménages, avec un développement parallèle des bas salaires. La mondialisation a mis en concurrence non seulement les salariés, mais également les États, leurs systèmes fiscaux et sociaux, entraînant une dégradation de la protection sociale et une remise en cause des politiques de redistribution des revenus dans les pays avancés.

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Écrit par

  • : professeur émérite d'économie, université Sorbonne Paris nord

Classification

Média

Paul Krugman - crédits : D. Applewhite/ Princeton University Office of Communications

Paul Krugman