ANCÊTRES CULTE DES
La complexité des faits
Religions archaïques
Le culte des ancêtres, au sens strict du terme, n'est pas clairement attesté dans les cultures les plus archaïques, chez les collecteurs et les chasseurs. On le rencontre, en revanche, en Mélanésie et dans certaines civilisations de type agricole. En Mélanésie, on érige en l'honneur de certains morts illustres des figures taillées en bois ; pourtant ces figures n'ont pas un caractère sacré. Aux Nouvelles-Hébrides, on façonne en bambou une représentation du chef décédé, qui est déposée ensuite dans la hutte cultuelle. Mais ici non plus l'image du chef n'est pas l'objet d'une vénération spéciale ; nous avons affaire à un culte des morts qui n'est pas encore complètement articulé. En d'autres régions, les représentations des morts illustres sont conservées plus longtemps, et parfois on leur fait des offrandes en échange de leur protection (surtout en cas d'épidémies). Dans les cultures mégalithiques de l'Asie sud-orientale, pour établir une liaison concrète entre les trépassés et les vivants, on érige des pierres sur lesquelles les âmes des morts sont censées s'asseoir. Appelés « sièges des esprits », ces monuments conservent indéfiniment les qualités des personnes en l'honneur desquelles ils ont été élevés ; ils assurent la fertilité des hommes, des troupeaux et des terres. Dans nombre de cultures mégalithiques, le monument élevé en l'honneur du chef finit par devenir le centre de la vie cultuelle et sociale du village : c'est autour de ce mégalithe qu'ont lieu les danses et les rituels publics, et c'est toujours là qu'on s'assemble.
La situation est différente dans les religions où le culte vise non pas les morts dans leur ensemble, mais un ancêtre mythique, c'est-à-dire un personnage considéré, dès l'origine, comme surhumain ou semi-divin. C'est le cas de certaines tribus de l'Australie centrale où les ancêtres mythiques (également connus dans la littérature ethnographique sous le nom de « héros totémiques ») sont à la fois les « créateurs » des hommes – qu'ils ont formés et auxquels ils ont insufflé une particule de leur vie – et des héros civilisateurs, puisqu'ils leur ont enseigné l'art de faire le feu, de chasser et de se nourrir, et leur ont révélé les institutions religieuses et sociales. Par la suite, ces ancêtres mythiques se sont évanouis sous terre ou se sont métamorphosés en rochers, en arbres ou en objets rituels. Cependant, leur disparition n'est pas définitive. D'une part, ils veillent sur la conduite des hommes ; d'autre part, ils se réincarnent perpétuellement ; la particule de « vie » qu'ils ont insufflée lors de la formation des hommes constitue une sorte d'« âme immortelle ». Au fond, chaque individu réincarne, au moins partiellement, un ancêtre mythique, mais il n'apprend ce mystère qu'à la fin de son initiation.
Dans d'autres religions primitives, le fondateur mythique de la tribu est censé être en même temps « premier homme » et héros civilisateur : l'humanité, c'est-à-dire la tribu, est son « œuvre », puisqu'elle descend de lui et a été civilisée par lui. Parfois, l'ancêtre mythique-héros civilisateur se confond avec la divinité suprême ; c'est le cas d'Unkulunkulu chez les Zoulous.
Religions orientales
La Chine fournit le premier exemple d'une intégration complète du culte des ancêtres dans l'ensemble de la vie religieuse. Dès l'époque la plus ancienne, le culte jouait un rôle fondamental : on croyait que les âmes des trépassés continuaient d'exister auprès des vivants, mais elles étaient également capables d'intercéder auprès du dieu du Ciel en faveur de leurs descendants. Les ancêtres étaient donc les protecteurs des vivants,[...]
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Écrit par
- Mircea ELIADE : professeur à l'université de Chicago
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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