CYCLES BIOGÉOCHIMIQUES
L'activité de la Terre est incessante : toutes ses couches – du noyau à la plus haute atmosphère – sont animées de continuels mouvements et, surtout, ses enveloppes superficielles – l'atmosphère, les océans et la surface des continents – abritent la vie. Les atomes et les molécules qui constituent ce système dynamique ne restent pas figés, mais circulent au travers des différents réservoirs que sont l'écorce terrestre, l'air, l'eau de mer, les rivières et les lacs, les glaciers, les sols et la biosphère, c'est-à-dire l'ensemble des êtres vivants.
Les éléments comme l'hydrogène, l'oxygène, le carbone, l'azote, le phosphore, le soufre et les métaux lourds sont indispensables à la formation des molécules organiques. Leur disponibilité a évolué au cours du temps avec le développement de la vie. Les premières bactéries sont apparues il y a plus de trois milliards d'années, dans une atmosphère sans oxygène. C'est l'apparition des algues photosynthétiques, capables de transformer le gaz carbonique et l'eau en matière organique avec dégagement d'oxygène sous l'action du rayonnement solaire, qui a conduit progressivement à la formation de l'atmosphère telle que nous la connaissons aujourd'hui.
Les géochimistes, qui étudient la circulation et les interactions des éléments dans la nature, ont découvert au cours du xxe siècle que tous les éléments décrivent des cycles, passant d'un réservoir à un autre pour finalement revenir dans le réservoir initial. Dans ces processus, la vie joue un rôle primordial, de sorte que le devenir des diverses molécules n'est pas gouverné par les lois de la chimie minérale mais par le fonctionnement des êtres vivants. C'est pourquoi la notion de cycle géochimique a fait place à celle de cycle biogéochimique, qui souligne le rôle essentiel des systèmes biologiques sur les conditions physico-chimiques régnant à la surface de notre planète.
Aujourd'hui, les activités humaines perturbent les cycles biogéochimiques naturels en raison de l'utilisation intensive de combustibles fossiles, d'engrais, de ressources minérales ou de molécules artificielles parfois toxiques. L'étude des cycles biogéochimiques non perturbés par les activités humaines devient de plus en plus difficile et même les zones les moins polluées, comme l'Antarctique ou le Groenland, subissent déjà l'impact des émissions industrielles.
L'hydrogène, l'oxygène et l'eau
Si l'hydrogène (H) est l'élément le plus abondant de la biosphère, il n'apparaît qu'exceptionnellement à l'état libre, au sein de quelques fermentations bactériennes, bien qu'il soit le vecteur essentiel de la bioénergétique : photosynthèse, respiration, fermentation. En fait, l'hydrogène s'identifie écologiquement à sa forme oxydée, l'eau (H2O), ce qui implique un autre élément gazeux, l'oxygène (O).
Le plus grand gisement d'oxygène est constitué par la lithosphère (3 × 1012 milliards de tonnes [Gt]), où il est immobilisé de manière quasi définitive sous forme d'oxydes (de silicium, d'aluminium, de fer, etc.) ou de sels (silicates, carbonates, etc.). À l'état gazeux, il constitue 21 p. 100 de l'atmosphère (1,1 × 106 Gt). Chaque année, la photosynthèse et la respiration des plantes et des sols correspondent à un échange de 80 Gt d'oxygène entre l'atmosphère et la biosphère. Comme les réserves de combustibles fossiles exploitables ne constituent qu'une faible fraction des matières organiques enfouies dans les sédiments (10 000 Gt de carbone), les activités humaines ne risquent pas d'appauvrir dramatiquement la teneur en oxygène de l'air. Celui qui est présent dans la biomasse représente 1 000 Gt, valeur inférieure à celle de l'oxygène[...]
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Écrit par
- Jean-Claude DUPLESSY : directeur de recherche au C.N.R.S., Centre des faibles radioactivités, Gif-sur-Yvette
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