CYCLES ÉCONOMIQUES
Ce n'est pas d'aujourd'hui, ni même d'hier, qu'on constate des fluctuations de l'activité économique, engendrant ce qu'il est convenu d'appeler des cycles. La Bible, par exemple, raconte le rêve de Pharaon – sept vaches maigres engloutissant sept vaches grasses – que Joseph interpréta comme l'annonce d'un cycle de sept années de bonnes récoltes suivi par un autre de sept années de récoltes médiocres. Il suggéra à Pharaon de stocker une partie des bonnes récoltes, pour pouvoir faire face ensuite aux années de vaches maigres, ce qui lui valut sa reconnaissance. Plus près de nous, les historiens de l'économie (Fernand Braudel et Ernest Labrousse notamment) ont relaté de nombreux épisodes de telles fluctuations d'origine agricole, aux conséquences souvent catastrophiques pour les sociétés anciennes qu'elles affectaient. Les causes étaient principalement climatiques ou liées à des épidémies (la grande peste au milieu du xive siècle en Europe, par exemple).
Dans des sociétés où l'agriculture n'occupe désormais qu'une part très réduite de la production et de l'emploi, les fluctuations d'origine climatique ne jouent plus qu'un rôle marginal. Pour autant, les fluctuations d'activité productive n'ont pas disparu, et certaines – pensons à la grande crise des années 1930 – ont laissé, par leur ampleur, des traces durables, aussi bien dans la société que dans la mémoire humaine. On pensait cependant que de tels phénomènes ne pouvaient plus se produire, en raison de politiques économiques anticrise beaucoup plus efficaces, et que seules des fluctuations de faible ampleur demeuraient possibles, comme le ralentissement de 2002-2003 (+ 0,9 p. 100 de progression de l'activité économique en France), suivi d'une reprise à 2,5 p. 100 en 2004). Mais la crise de 2008, dite des subprimes (du nom d'un certain type de prêts immobiliers aux États-Unis), a provoqué une crise majeure. Certes, les vigoureuses politiques publiques mises partout en œuvre pour empêcher que les banques ne soient emportées par la tourmente financière et pour soutenir l'activité économique ont cassé la spirale dépressive qui avait caractérisé les années 1930. Mais les pays les plus fragiles de la zone euro, contraints de réduire leurs déficits publics pour lutter contre la spéculation dont ils étaient l'objet, voient leur activité continuer de se réduire : en 2012, le P.I.B. était inférieur de 3 p. 100 à celui de 2007 pour la Finlande, de 4 p. 100 pour l'Espagne, de 5 p. 100 pour la Slovénie, de 6 p. 100 pour le Portugal et l'Irlande, de 7 p. 100 pour l'Italie, de 20 p. 100 pour la Grèce. Ainsi, loin de s'atténuer, il semble que les fluctuations économiques tendent à reprendre avec une beaucoup plus grande 'ampleur alors que, au moins durant la période des Trente Glorieuses (1946-1973), elles avaient quasi disparu en France et dans une grande partie des pays développés. Qu'en disent les économistes et à quoi attribuent-ils ces fluctuations ?
Fluctuations ou cycles ?
Les différentes phases d'un cycle
Le terme « cycle » se substitue souvent à celui de fluctuations. Alors que ces dernières désignent de simples irrégularités aléatoires autour d'une tendance, le cycle 'est un parcours qui revient régulièrement : une phase d'accélération (l'expansion), plus ou moins rapide, plus ou moins longue, qui tend à se ralentir, jusqu'à atteindre un apogée (la crise). Puis une phase de décroissance (la dépression), elle aussi plus ou moins forte, plus ou moins longue, qui finit par se ralentir, puis s'arrêter, pour donner naissance à un retournement (la reprise) qui marque le début d'un nouveau cycle. Depuis les années 1970, contrairement à ce qui se passait durant le premier tiers du[...]
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Écrit par
- Denis CLERC
: conseiller de la rédaction du journal
Alternatives économiques
Classification
Média
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