DAMAS
Damas, une grande métropole du Proche-Orient
Naissance d'une ville moderne
À la veille des grandes mutations du xixe siècle, la physionomie de Damas reflète les étapes successives de l'extension urbaine aux époques antérieures. La médina enserrée dans ses remparts, avec la Grande Mosquée, la citadelle et ses nombreux monuments religieux et civils, ainsi que ses souks, constitue un ovale de 1 500 mètres sur 800 mètres le long de cours principal du Barada. À l'est se regroupe l'essentiel de la population chrétienne. Au sud-est se trouve le quartier juif. Hors les murs, vers le sud, le faubourg du Mîdan s'est constitué depuis l'époque mamelouke et est principalement tourné vers les activités liées à la caravane du pèlerinage de La Mecque. Vers le nord-ouest, sur le flanc du Qassioum, le quartier de Salhiyeh s'organise à l'écart de la ville depuis le xiie siècle.
La tutelle égyptienne sur la Syrie (1832-1840), puis les réformes de l'Empire ottoman à partir de la seconde moitié du xixe siècle vont entraîner des transformations progressives des conditions de développement de la ville. Celle-ci bénéficie d'un réseau de communications plus moderne, avec de nouvelles routes et des voies de chemins de fer vers la côte méditerranéenne et Alep et, au-delà, vers la Turquie et la Mésopotamie, ce qui renforce sa centralité régionale. Mais, dans le même temps, l'ouverture du canal de Suez au sud et d'une route vers l'Asie par la mer Noire déclasse le carrefour damascène. La montée en puissance de Beyrouth et sa prééminence sur la capitale de l'intérieur syrien se nourrit de son développement portuaire et de l'exil de nombreux chrétiens de Damas après le massacre dont leur communauté a été la victime en 1860 (environ 5 000 morts).
Une modernisation graduelle de la ville est entreprise à l'initiative de différents gouverneurs comme Midhat Pacha, nommé en 1878, qui réaménage des souks. La place Marjeh est construite au bord du Barada et devient le centre moderne. La ville s'étend progressivement vers Salhiyeh et de nouveaux quartiers sont construits dans les jardins. Selon une estimation, la population atteint 135 000 habitants en 1887 (J.-L. Arnaud, 2006).
À la fin de la période ottomane, Damas devient l'un des centres du nationalisme arabe. Des figures comme l'homme de lettres Muhammad Kurd Ali ou l'homme politique Jamil Mardam Bey illustrent ce mouvement, qui est durement réprimé par les Turcs, notamment durant la Première Guerre mondiale. La ville est l'éphémère capitale d'un royaume arabe (1918-1920) dont Faysal, le chérif de La Mecque, prend la tête avant d'être battu par les troupes françaises. En 1925-1926, la révolte arabe contre la domination française trouve à Damas un point d'appui actif et oblige les troupes du Mandat à bombarder la ville, causant d'importants dégâts. La politique française de division de la Syrie en plusieurs États à dominante confessionnelle limite le rayonnement de la ville.
La croissance d'une métropole arabe contemporaine
À l'indépendance (1946), la nouvelle capitale de la Syrie, peuplée de 300 000 habitants, reste numériquement dominée par Alep, qu'elle ne dépassera qu'à la fin des années 1950. Malgré l'instabilité politique de la Syrie jusqu'à 1970, marquée par de nombreux coups d'État et par l'éphémère République arabe unie (1958-1961) formée avec l'Égypte, la capitale syrienne profite économiquement de la centralisation politique du pays. Elle devient aussi la principale destination de l'exode rural en provenance de toutes les régions du pays, renforcé par l'arrivée des réfugiés palestiniens après 1948, et des Druzes chassés du Golan en 1967. L'agglomération compte environ 3,6 millions au recensement de 2004. Majoritairement[...]
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Écrit par
- Nikita ELISSÉEFF : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Lyon
- Éric VERDEIL : chargé de recherches au C.N.R.S.
Classification
Médias
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