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GRAHAM DAN (1942-2022)

Les premiers travaux de Dan Graham, né le 13 mars 1942 à Urbana (Illinois), datent de 1965, alors que débutent officiellement les grands mouvements de l’art américain : pop art, art minimal et art conceptuel. D’abord inspirée de l’esprit de ces mouvements, son œuvre va rapidement s’en démarquer, tant formellement qu’idéologiquement, puisqu’elle va recourir à la performance, à la photographie, à la vidéo, à la culture rock, à l’architecture, afin de mieux ancrer l’objet d’art dans l’espace public et de lui octroyer une fonction socio-politique qui va à l’encontre des formalismes régnant alors.

Après une brève expérience comme galeriste à la Green Gallery (New York) en 1964, Dan Graham entreprend quelques expérimentations d’ordre conceptuel, dont la plus aboutie est Schema (1966). Il s’agit d’une page isolée, intégrée dans un magazine et qui comporte pour tout commentaire le descriptif de ses caractéristiques physiques : qualité du papier, nombre de mots, taille des caractères, etc. La même année, Dan Graham publie dans Arts Magazine, Homes for America, photographies de lotissements de banlieue accompagnées d’un texte détaillant les possibilités du développement immobilier de l’environnement exposé (nombre de rues, portes, fenêtres, couleurs et matériaux éventuels, etc.). La revue lui commande alors des textes de critique d’art et de critique musicale, activité qu’il poursuivra jusqu’au début des années 1980.

De 1969 (TwoCorrelatedMirrors) à 1976 (Public Space/Two Audiences), par le truchement de la photographie, et surtout de la vidéo, il s’intéresse aux phénomènes de perception, tentant de faire coïncider l’optique des appareils et les expériences perceptives de l’utilisateur et du spectateur ou, au contraire, de les dissocier. À cet effet, il créera des espaces comprenant des jeux de miroirs où l’on se reflète à l’infini, y ajoutant souvent des caméras et des moniteurs qui renvoient l’image du spectateur. Le miroir comme révélateur d’effets psychologiques marque un tournant dans son projet, dans la mesure où l’on peut avoir simultanément une expérience visuelle, corporelle et psychique, soit individuelle, soit collective. L’œuvre la plus significative de cette période est sans doute PresentContinuous Past(s), 1974, Musée national d’art moderne, Paris. Dans une pièce dont deux murs sont recouverts de miroirs, le spectateur est en face d’une caméra placée au-dessus d’un moniteur. Son image est d’abord retransmise en temps réel, et pendant que la caméra continue à le filmer, la première image est retransmise huit secondes plus tard. Comme la caméra fait face à l’un des miroirs, elle filme par là même le décalage de la retransmission : le spectateur est ainsi confronté à lui-même dans les reflets du miroir tout en remontant régulièrement le temps par l’image télévisuelle. Différents dispositifs sont ainsi exploités par Dan Graham, qui ira jusqu’à en placer dans des vitrines ou dans des immeubles, intégrant ainsi la dimension urbaine et publique de la vie quotidienne des utilisateurs-acteurs.

Les enjeux propres à l’architecture des grandes cités sont directement interrogés dans la série des Pavillons à partir de la fin des années 1970. Structures en verre ou en miroir à échelle humaine, situées entre la construction fonctionnelle et l’objet sculptural, placées dans des jardins, dans des maisons particulières ou dans des musées, plus que lieux d’habitation réels, les Pavillons sont des espaces de réflexion intégrés à l’urbanisme afin d’en révéler les défauts. Mais ils apparaissent également comme des espaces ludiques, purs fragments d’utopie au sein de la vie urbaine (From Boullée to Eternity, 2006, Porte de Versailles, Paris).

Plusieurs vidéos – Two-Way Mirror Cylinder Inside Cube and a Video Salon (1992) au Centre Georges-Pompidou, Paris[...]

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Écrit par

  • : professeur en esthétique à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, critique d'art
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Autres références

  • INSTALLATION, art

    • Écrit par
    • 3 512 mots
    • 1 média
    Avec les Américains Bruce Nauman ouDan Graham, l'installation devient vidéo et la caméra revêt une fonction de surveillance. Avec des caméras et des moniteurs, en effet, les deux artistes mettent à l'épreuve l'acuité du visiteur à l'égard du temps et de l'espace. Dans ...