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DANICHMENDIDES

Tribu turcomane, les Danichmendides ont établi leur autorité sur l'Asie Mineure centre-orientale durant un siècle, de 1080 à 1180 environ. Leur fondateur et éponyme, l'émir Malik Danichmend, apparaît en Cappadoce vers 1080-1085 ; il a été mêlé aux événements dus au passage de la Première Croisade en Asie Mineure, mais dans l'ensemble sa biographie est mal connue ; elle a été l'objet de récits et de légendes où la vérité a été souvent déformée. Cependant, au travers de la Geste de Malik Danichmend, on peut suivre les activités des Danichmendides à la fin du xie siècle et au début du xiie. Au moment de l'arrivée des croisés (1096), Malik Danichmend occupe la région s'étendant de Sébaste (Sivas) et Eudoxias (Tokat) à Césarée (Kayseri) et exerce plus largement une influence du Pont à la Géorgie. Alors qu'il assiège Mélitène (Malatya) en juillet 1100, il est attaqué par Bohémond d'Antioche, mais celui-ci est fait prisonnier et une armée chrétienne de secours mise en déroute ; c'est seulement en mai 1103 que Bohémond est libéré, après avoir signé un traité d'alliance avec Danichmend contre les Byzantins et les Seldjoukides, mais la mort de Malik Danichmend l'année suivante rend le traité sans objet. Entre-temps, Danichmend avait écrasé les renforts aquitains et bavarois expédiés en 1101 vers la Terre sainte, occupé Mélitène (reperdue en 1104) ; il apparaissait alors comme le champion de l'islam face aux croisés et aux Byzantins.

Son fils Emir Ghazi (1104-1134) intervient à plusieurs reprises dans les querelles internes de la dynastie seldjoukide, reprend Mélitène, occupe Ankara, Césarée, Gangra, Kastamonou, intervient en Cilicie et dans le comté d'Edesse et lutte contre le basileus Jean Comnène. Son règne marque l'apogée de la dynastie danichmendide. Son œuvre a été continuée par son fils Malik Mohammed (1134-1142), mais à la mort de celui-ci, l'usurpation du pouvoir par son frère Yaghibassan au détriment de son neveu Dhou'l-Noun entraîne la division du territoire en deux, puis en trois petits États, ce dont profite le sultan seldjoukide Kilidj-Arslan II. Celui-ci, au cours de guerres qui ont duré plus de trente ans, soutient d'abord Dhou'l-Noun avant de se retourner contre lui. En 1174-1175, Kilidj-Arslan s'empare des régions septentrionale et occidentale de l'émirat danichmendide ; en 1178, la prise de Mélitène marque la fin de l'émirat et de la dynastie danichmendide.

L'histoire des Danichmendides est une illustration des transformations survenues en Asie Mineure depuis le dernier quart du xie siècle : la défaite subie par les Byzantins à Mantzikert en 1071 a ouvert la porte de ce pays aux tribus turcomanes (Danichmendides, Seldjoukides, Saltoukides...) qui, d'une part, interviennent dans les luttes des prétendants au trône impérial byzantin et, d'autre part, s'emparent d'un grand nombre de villes en Asie Mineure centrale et orientale aux dépens des Byzantins et, parfois, des Arméniens. En général, les rapports avec ces derniers ont été assez bons, sauf lorsque les Arméniens ont pris le parti des croisés ou en ont été les vassaux. La pénétration turcomane en Asie Mineure s'est poursuivie et accrue au xiie siècle, donnant peu à peu un aspect nouveau à diverses régions où les Grecs sont devenus, avec le temps, minoritaires ou tout au moins soumis à des autorités nouvelles qui, à la fin du xiie siècle, se sont résumées en la puissance unique de la dynastie seldjoukide : la turcisation de l'Asie Mineure, future Anatolie, est alors en si bonne voie qu'un chroniqueur des croisades donne, au xiie siècle, à ce pays le nom de « Turchia ».

— Robert MANTRAN

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Provence-Aix-Marseille-I

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