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GÉLIN DANIEL (1921-2002)

Daniel Gélin restera le symbole de la jeunesse enthousiaste et prête à croquer la vie à belles dents après les ravages de l'Occupation. Mèche noire sur le front, œil tendre et moqueur, voix de velours, il a imprimé entre 1945 et 1960 son image sur les écrans, et imposé au théâtre des personnages qui séduisaient les critiques et troublaient les spectateurs.

Né en 1921 à Angers, la capitale l'attire irrésistiblement. Daniel Gélin y débarque à dix-sept ans pour suivre quelques cours de comédie. Il joue des coudes avec les figurants et traverse la drôle de guerre. Dès la réouverture des studios en 1941, remarqué par Henri Decoin, il s'impose parmi les étudiants de Premier Rendez-Vous. Le théâtre lui fait signe. Il apparaît dans une pièce policière de Michel Arnaud, récidive grâce à Henri Georges Clouzot et à sa Comédie en trois actes (1942). Il monte un spectacle à la comédie des Champs-Élysées et participe en 1944 au Voyage de Thésée de Georges Neveux. Un court-métrage, Étoiles de demain, avait laissé présager la courbe ascendante de sa carrière. Deux films, La Tentation de Barbizon (Jean Stelli, 1945) et Martin Roumagnac (Georges Lacombe, 1946), le propulsent dans cette valse-hésitation entre drame et comédie qu'il attaque brillamment. Ainsi démarre un trajet de cent trente films, français souvent, italiens parfois.

En 1949, Rendez-Vous de juillet, de Jacques Becker, lui permet de brosser le véridique portrait d'un jeune Français, non dépourvu de romantisme, mais tenace dans la poursuite de ses désirs d'ethnologue : c'est un témoignage d'une époque, et aussi une célébration de l'été de la vie dans l'exaltation du jazz et des passades amoureuses, sur fond de caves existentialistes. Becker va transformer l'apprenti vedette en virtuose contraint de s'exhiber dans un salon snobinard (Édouard et Caroline, 1951). Puis, en 1953, il lui restitue son identité de séduisant bohème dans Rue de l'Estrapade, où il joue à patte de velours avec Anne Vernon. De son côté, Max Ophuls lui offre de filer le sketch ironique et caressant de La Ronde (1950), au côté de Danielle Darrieux. Il l'interprète tout en finesse. Avec Le Plaisir (1952), il passe de l'allégresse amoureuse à la muflerie pour constater mélancoliquement que « le bonheur n'est pas gai ». La même année, il réalise Les Dents longues, film sur l'arrivisme journalistique qu'il interprète au côté de son épouse, Danièle Delorme.

Daniel Gélin évolue des comédies chatoyantes de Christian-Jaque et de Decoin à la noirceur glacée de La neige était sale, d'après Simenon (Luis Saslavsky, 1954). Commencé au théâtre, ce voyage au bout de l'abjection établit définitivement en haut des affiches celui qu'on considérait alors comme un comédien léger.

On le sollicite de tous côtés. Hitchcock l'utilise à sa façon dans L'Homme qui en savait trop (1956) et Cocteau l'inscrit dans son Testament d'Orphée (1960). Pierre Kast le choisit pour évoquer La Morte Saison des amours (1961) et relater les Vacances portugaises (1963). L'acteur s'amuse aussi à se déguiser, à l'instigation de Sacha Guitry, d'abord dans Si Versailles m'était conté (1954), puis dans Napoléon (1955) où il tient le rôle de Bonaparte. Résistant dans Paris brûle-t-il ? (René Clément, 1966), il voit chanceler la royauté dans La Nuit de Varennes (Ettore Scola, 1982).

Sur scène, s'il ne crée pas certains rôles (Huis Clos, ou Les Parents terribles), Daniel Gélin se les approprie lors des reprises. C'est le temps du petit écran : en 1965, en compagnie de Micheline Presle et sous l'invocation des « Saintes Chéries », il comble d'aise les téléspectateurs. Au cinéma, il passe de Marguerite Duras (Détruire dit-elle, 1969) à Jean-Pierre Mocky (Un linceul[...]

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