LIBESKIND DANIEL (1946- )
Né en 1946 à Lodz en Pologne, Daniel Libeskind se destinait à une carrière de musicien quand il décida de se lancer dans l'architecture. Formé à la Cooper Union School de New York (il est diplômé en 1970), il emprunte, avant de construire, le chemin des théories déconstructivistes influencées par la pensée de Jacques Derrida. Son œuvre est placée sous le signe du sens et de la mémoire.
Pour la biennale de Venise, en 1985, Daniel Libeskind édifie des machines en bois (« Machine à lire », « Machine de mémoire » et « Machine à écrire » composées de 2 662 pièces...) qui brûleront lors d'une exposition à Genève quelques années plus tard. En 1988, il est l'un des huit architectes déconstructivistes présentés au Museum of Modern Art de New York. Cette exposition « historique » constitue pour lui le tremplin qui lui permit de passer de la théorie à la pratique. Son premier bâtiment, un pavillon, est construit au Japon (Osaka Folly, 1989-1990) ; il est invité ensuite à de nombreux concours internationaux. À partir des collages et autres assemblages de sa première période, il s'engage dans une réflexion sur la sédimentation de la ville et sur la mutation des lieux. Après City Edge, projet lauréat étudié en 1987 dans le cadre de l'I.B.A. (Internationale Bauausstellung) de Berlin, il se distingue à deux reprises. D'une manière très radicale, en 1993 ; avec un projet pour le site de Sachsenhausen qui fait grand bruit : il propose, afin d'« accélérer la ruine de l'histoire », de noyer les vestiges du camp de concentration nazi sous un lac. Son projet pour la célèbre Alexanderplatz à Berlin est un autre succès médiatique. Là encore, l'architecte se bat avec l'histoire en proposant, plutôt que de raser ce que l'ère soviétique avait légué à la ville, de le couler au milieu du bâti existant. Il obtient un deuxième prix (de consolation), la ville de Berlin préférant construire un ensemble de tours signé Hans Kolhoff sur ce site cher à Alfred Döblin qui lui a consacré l'un de ses romans.
C'est dans la nouvelle capitale allemande que Daniel Libeskind réalise son premier grand projet : le Musée juif. Baptisé Between the Lines, ce bâtiment très radical peut être lu comme une étoile juive « déconstruite ». C'est en tout cas une ligne brisée. Articulé autour d'une succession de vides, le musée offre des espaces intérieurs étonnants dont certains, comme la tour de l'Holocauste, sont en béton brut. À l'extérieur, le bâtiment se remarque par sa peau de zinc bleui, lacérée par des « coupures », percements obliques qui permettent à la lumière d'entrer à l'intérieur du musée. Le réseau de ces ouvertures résulte d'un graphisme très particulier : le décryptage de toutes les adresses des juifs de Berlin déportés par les nazis. Dix ans ont été nécessaires pour construire ce projet, fruit d'un concours international lancé en 1989. Le hasard veut que le Musée juif a été inauguré en 1999, vide, par le nouveau chancelier allemand Gehrard Schröder, presque au même moment que le musée d'Osnabrück. Moins symbolique, ce petit musée dédié à un peintre mort à Auschwitz (collection Felix Nussbaum) reprend des éléments de son grand frère berlinois, notamment l'idée des percements obliques dans les parois de béton.
Au tournant du xxie siècle, Daniel Libeskind travaille sur trois programmes culturels importants. Le Musée juif de Berlin (1999) a entraîné la commande d'un musée juif à San Francisco (2008) et celle de l'Imperial War Museum (2002) à Manchester en Grande-Bretagne. L'extension du Victoria and Albert Museum, à Londres, a été finalement annulée, faute de fonds. Par ailleurs, en 2003, Daniel Libeskind a été choisi pour mener à bien, avec d’autres architectes, la reconstruction[...]
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Écrit par
- Francis RAMBERT
: journaliste, critique d'architecture, rédacteur en chef de la revue
D'architectures - Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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Autres références
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