ACEMOĞLU DARON (1967- )
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Un prix Nobel valorisant le courant institutionnaliste
C’est toutefois dans le champ de l’étude du développement qu’Acemoğlu sera le plus reconnu. Dans un article de 2001 coécrit avec Simon Johnson et James Robinson, il établit un lien entre la qualité des institutions et la prospérité à long terme des nations. L’étude défend l’idée que les institutions dites « inclusives », telles que le droit de propriété, l’état de droit et les processus démocratiques, établis en l’occurrence par les colons européens au fil des siècles, sont un gage de création de richesses à long terme. En cela, les auteurs s’inscrivent dans le sillon institutionnaliste réformé par l’économiste américain Douglass North, Prix Nobel d’économie avec l’historien Robert Fogel en 1993.
La spécificité de l’approche d’économie politique des lauréats de 2024 réside toutefois dans leur capacité à créer des liens entre les études macroéconomiques, dominantes sur les questions de développement jusqu’aux années 2000, et la nature des institutions empreintes de dynamiques historiques et culturelles. Cependant, tant selon le trio nobélisé dans un article de 2002, que pour Acemoğlu et Robinson dans un célèbre livre publié en 2012, Why Nations Fail, le rôle des institutions politiques est certainement prépondérant. De ce point de vue, le Nobel attribué aux trois économistes consacre une approche à la fois hétérodoxe et hétéroclite qui aide à comprendre les dynamiques de la prospérité mais aussi les états de blocage qui l’entravent.
Le courant institutionnaliste spécifique d’Acemoğlu suscite néanmoins des critiques. Pour les uns, la thèse sur les effets vertueux des institutions « inclusives » n’est pas toujours vérifiée : certains pays se sont développés en conservant des pouvoirs autoritaires ou encore peu démocratisés. D’autres pointent un excès de déterminisme dans les conclusions des trois auteurs nobélisés, les institutions étant à elles seules loin d’être suffisantes pour comprendre le développement. Ainsi, l’approche d’Acemoğlu et consorts négligerait quantité de facteurs ayant contribué ou freiné la création de richesses. Enfin, d’autres théories, relevant de la géographie, de la religion ou de la typologie du pouvoir conservent évidemment leur importance.
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Écrit par
- Olivier MARTY : enseignant en économie européenne à Sciences Po et à l'université de Paris
Classification
Média