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DAUMIER, L'ÉCRITURE DU LITHOGRAPHE (exposition)

L'œuvre d'Honoré Daumier (1808-1879), trop longtemps ignorée dans sa diversité, a été redécouverte lors de la grande rétrospective qui s'est tenue au Galeries nationales du Grand Palais à Paris en 2000. Le bicentenaire de la naissance de l'artiste a permis d'approfondir la connaissance que nous avons de lui grâce à l'exposition consacrée à L'Écriture du lithographe sous la direction de Valérie Sueur-Hermel à la Bibliothèque nationale de France, site Richelieu, du 4 mars au 8 juin 2008. Confiée à trois spécialistes reconnus de Daumier – Ségolène Le Men, Michel Melot et Philippe Kaenel –, l'analyse des œuvres souligne leurs qualités exceptionnelles. De la monarchie de Juillet à la chute du second Empire, une formidable comédie humaine se déploie au fil des lithographies sélectionnées parmi les quatre mille issues de son activité de dessinateur de presse. Le processus d'élaboration des lithographies constitue l'essentiel du parcours de l'exposition. Passionnante et véritable originalité dont rend compte l'excellent catalogue.

Bien des motifs sont connus par la consultation des périodiques auxquels Daumier a contribué, comme La Silhouette, La Caricature, L'Association mensuelle, Le Boulevard, Le Journal amusant et surtout Le Charivari. Cependant, grâce au dépôt légal, les fonds exposés montrent des épreuves « sur blanc » en regard de tirages sur papier journal, ainsi que quelques-unes des rares pierres lithographiques existantes. L'ensemble donne aux créations de Daumier leur véritable dimension artistique, exprimant sa verve comme son formidable talent graphique.

La présentation suit la chronologie de la carrière de Daumier et à celle d'une époque dont il aura forgé les images critiques les plus fortes. De la monarchie de Juillet à la révolution de 1848 et à la IIe République, puis à la vie sous le second Empire, une écriture personnelle s'affirme tout au long de l'œuvre lithographié. Parmi les œuvres marquantes se trouve le célèbre Gargantua (1831) où Louis-Philippe, trônant sur une chaise percée, dévore les pièces de monnaie livrées par un peuple misérable et les défèque pour le plus grand profit de ses proches. Image de lèse-majesté qui valut à Daumier une condamnation et un début de notoriété. La galerie des Célébrités du juste-milieu et Le Ventre législatif (1834), estampes où figurent les personnalités du régime, illustrent non seulement la veine satirique de l'artiste, mais aussi sa maîtrise des dégradés du noir au blanc – une maîtrise qui se confirme dans l'ensemble des lithographies exposées. Moins connue, La Rue Transnonain, le 15 avril 1834 montre les cadavres d'innocents massacrés durant leur sommeil, en représailles d'une émeute dans laquelle ils n'étaient pas impliqués. Cette estampe fut publiée dans L'Association mensuelle, une publication créée en 1834 par Charles Philipon – directeur-fondateur de La Caricatureet du Charivari – pour financer les frais de procès et amendes qui frappaient La Caricature. Avec cette gravure d'une sobriété factuelle sans pathos ni affectation, Daumier se range parmi les peintres d'histoire et anticipe le courant réaliste en peinture. Il met également en scène les ouvriers imprimeurs en lutte pour la liberté de la presse avant la censure qui s'abat en 1835. La désolation est totale pour Daumier comme pour ceux qui, morts pour la liberté, sortent de leurs tombes et constatent : « C'était bien la peine de nous faire tuer ! »

La caricature de mœurs exploite les marges de la liberté autorisées par les contraintes de la censure sous la monarchie de Juillet. Le Charivari propose une suite de scènes de la vie quotidienne (Types parisiens, Les Mœurs conjugales, Les Bas-bleus, Les Gens de justice, Les Bons Bourgeois, Locataires[...]

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