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DAVENANT sir WILLIAM (1606-1668)

Né à Oxford ; on dit que Shakespeare le tint sur les fonts baptismaux. C'est peut-être ce qui lui donna l'amour du théâtre et de la poésie. Ce fils de tavernier (respectable), qui eut l'insigne honneur de succéder à Ben Jonson comme poète-lauréat (1638), épousa la cause du roi, fut anobli par Charles Ier (1643), jeté à la Tour (1650-1652) d'où il fut, dit-on, tiré par Milton. Il est, avant tout, homme de théâtre et, même si ses pièces ne soulèvent pas l'enthousiasme, son rôle est loin d'être négligeable dans l'histoire de l'art dramatique. Contemporain de Shirley (1596-1666), en qui s'épuise la tradition ben-jonsonienne pour faire place aux charmes fletchériens, Davenant, quelque quinze ans avant la fermeture des théâtres (1642), écrit des comédies de mœurs (Le Frère cruel : The Cruel Brother, 1627) et des tragédies romanesques (Albovine, King of the Lombards, 1628) dans la veine de Fletcher. Il revient à la comédie en 1633 (Les Beaux Esprits : The Wits), se délecte à la tragédie de cape et d'épée (Les Amants espagnols : The Spanish Lovers, 1639) et à la tragédie de cour, dont Love and Honor (1634) est le prototype. On y voit l'héroïne, Avandra, captive en Savoie, courtisée par trois prétendants, prêts à se sacrifier pour elle. L'amour et l'honneur rivalisent de courage et de dévouement et, après des péripéties en cascade, tout finit bien. Cette pièce reflète admirablement l'idéalisme conventionnel et les jeux de panache qui ont succédé à la vision tragique du monde jacobéen. De même, les masques, tels Le Temple de l'amour (The Temple of Love, 1635), Les Amants platoniques (The Platonic Lovers, 1635), La Belle Favorite (The Fair Favourite, 1638), exaltent les nobles vertus de la chasteté et de l'amour délicatement platonique qui enchantaient la Cour et la reine Henriette. La sentimentalité se fait moralisante par les délices d'un lyrisme affadi.

Après la chute du roi et pendant la dure épreuve du gouvernement de Cromwell, Davenant, persécuté, ayant tout perdu, demande encore au théâtre ses joies et son salut. Il réussit, malgré l'interdiction, à monter en privé un Divertissement à Rutland House (1656) qui, toléré par le pouvoir, ouvrit la voie à la résurrection du théâtre. En 1656, il fit jouer la première partie du célèbre Siège de Rhodes qui inaugurait un spectacle nouveau : l'opéra. Le texte avait été mis en musique et devenait récitatif. Ainsi le théâtre héroïque dégénérait en opéra à grand spectacle, emphatique dans toutes ses formes. Le Siège de Rhodes fut suivi de La Cruauté des Espagnols au Pérou (The Cruelty of the Spaniards in Peru, 1658), drame héroïque agrémenté de musique, de grandiloquence et d'excentricité. À la Restauration, Davenant retrouva tout son crédit auprès de Charles II. Il reçut, avec Thomas Killigrew l'aîné (1612-1683), le monopole des activités théâtrales à Londres. Ils fondèrent le théâtre de Covent Garden. À Covent Garden, Davenant donna une seconde partie au Siège de Rhodes, accommoda au goût du jour, avec Dryden, La Tempêtede Shakespeare. Décidément, l'époque avait infléchi le drame jacobéen vers l'opéra et le drame héroïque prisé par Dryden, qui l'apparentait au poème héroïque, empreint de grandeur et de majesté, comme le théâtre de Corneille, haute citadelle que la cour des Stuarts en exil avait eu tout le loisir d'admirer.

— Henri FLUCHÈRE

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Écrit par

  • : doyen honoraire de la faculté des lettres et sciences humaines d'Aix-en-Provence

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