GANS DAVID (1541-1613)
Historien, cosmographe et astronome juif de l'époque de la Renaissance, David Gans fut le premier auteur hébraïque à mentionner Copernic, d'une manière très élogieuse d'ailleurs, le premier aussi à donner une description correcte des continents à la suite de la découverte de l'Amérique.
Né à Lippstadt, en Westphalie, David Gans entreprend des études rabbiniques qui le mènent d'abord dans les écoles talmudiques de Bonn et de Francfort, puis dans celle de Cracovie, en Pologne, où il trouve un premier maître en la personne du rabbin Moïse Isserlès (le « Rema »), lequel ne l'instruit pas seulement en matière rabbinique mais lui inculque le goût de l'histoire et des mathématiques. Ce goût se change en une véritable passion, à Prague, où David Gans vit à partir de 1564 et où il devient l'un des disciples préférés du rabbi Juda Loeb (le « Maharal de Prague »). Lorsque l'empereur Rodolphe II de Habsbourg installe, en 1599, au château de Bénatek près de Prague, l'observatoire du célèbre astronome danois Tycho Brahe, David Gans fait partie de l'équipe des collaborateurs de ce dernier, auquel succédera, après sa mort prématurée en 1600, Johannes Kepler. David Gans vit à Prague, en chercheur privé, sans exercer aucune fonction officielle, se consacrant exclusivement, jusqu'à sa mort, à son œuvre de savant. Il est enterré au cimetière juif de Prague, à quelques pas de la tombe du Maharal et de celle d'un autre astronome juif, Joseph Salomon Delmedigo, qui fut l'élève de Galilée à Padoue et mourut à Prague en 1655.
Dans les nombreux domaines que recouvre l'œuvre (partiellement inédite ou perdue) de David Gans, celui-ci fait preuve d'une curiosité aiguë, d'une érudition vaste, d'une tolérance généreuse vis-à-vis de toutes les idées nouvelles ; ces qualités font de lui le représentant le plus remarquable, quoique trop longtemps méconnu, de l'humanisme juif en Europe centrale et orientale au xvie siècle.
Il est célèbre surtout comme historiographe. Sa chronique, Zemah David, publiée à Prague en 1592, comporte deux volets, l'un consacré à l'histoire juive, l'autre à l'histoire profane, depuis les origines jusqu'en 1592. Les notices en sont parfois inexactes, mais elles sont toujours vivantes, pittoresques, et comportent souvent des indications autobiographiques. C'est ainsi que l'historicité de la célèbre audience accordée, en 1592 précisément, par Rodolphe II au Maharal se trouve ici garantie par David Gans. Le Zemah David a connu, depuis l'édition originale, onze réimpressions.
Mais la grande œuvre de David Gans, un ouvrage de cosmographie et d'astronomie, n'a été imprimée qu'une seule fois, à Jessnitz, en 1743, c'est-à-dire cent trente ans après la mort de son auteur, sous le titre de Nehmad Venaïm. Dans le cadre encore ptoléméen de son système astronomique, David Gans insère une mappemonde parfaitement à jour et décrivant l'Ancien et le Nouveau Monde avec une précision cosmographique encore très rare à l'époque. Mais, surtout, il mentionne, d'une manière dithyrambique, le grand Nicolas Copernic et sa révolution (au moment même où l'œuvre du savant est mise à l'Index par l'Église catholique et où l'Église réformée entreprend, elle aussi, une « chasse aux sorcières » contre les adeptes du système copernicien). La tolérance de David Gans lui vient de ses maîtres juifs, le Rema et le Maharal, qui sont déjà eux aussi persuadés que le système de Copernic est conciliable avec la tradition juive. Elle lui est inspirée également par son expérience personnelle à l'observatoire de Bénatek. En des pages vibrantes d'enthousiasme, David Gans décrit, dans le Nehmad Venaïm, les instruments merveilleux inventés par Tycho[...]
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Écrit par
- André NEHER : professeur honoraire de l'université de Strasbourg
Classification
Autres références
-
LOEB RABBI, dit LE MAHARAL DE PRAGUE (1512-1609)
- Écrit par André NEHER
- 2 083 mots
...que l'empereur Rodolphe II de Habsbourg vient d'appeler et d'installer somptueusement près de Prague. L'un des disciples les plus proches de Rabbi Loeb, David Gans (1541-1613), historien, mathématicien et physicien, est un hôte fréquent de l'observatoire de Tycho Brahe, pour lequel il traduit en allemand...