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HOCKNEY DAVID (1937- )

Inventer l'espace pictural

Le rapport entretenu par David Hockney avec la photographie est révélateur de son approche toute particulière du réalisme : photographe amateur de longue date, il conserve ces clichés dans des albums aujourd'hui nombreux et les emploie avec une grande liberté pour l'élaboration de ses tableaux, combinés avec des références à la peinture classique, en particulier italienne (Fra Angelico, Piero della Francesca) ; puis à partir de 1982, réagissant à la volonté du musée national d'Art moderne de Paris d'exposer ses photographies, il réalise des Joiners ou « photos-jointives », des assemblages en grilles de polaroïds représentant un même sujet (la terrasse de sa maison de Hollywood Hills par exemple) fragmenté et vu sous différents points de vue ; il poursuit ensuite la production de photocollages, moins régulièrement disposés, avec un appareil classique qui lui apparaît, non comme un simple instrument d'enregistrement objectif du réel, mais comme un « extraordinaire outil de dessin ». Œuvres, textes et conférences témoignent de l'ambivalence de Hockney à l'égard du médium photographique : « Nous avons tous appris à croire en la représentation du réel livré par l'appareil, nous croyons l'appareil photographique. Ceci est une erreur grave. Les photographies ne sont pas exactement ce que l'on pense. »

Les Joiners participent d'une recherche sur la construction de l'espace pictural qui anime l'ensemble de l'œuvre de Hockney. Il puise ainsi à la source du cubisme et recourt à la perspective inversée, explore les ressources de la surface, travaille à contrer les effets du cadre et rejette constamment les lois de la perspective classique. Les rouleaux chinois, entre autres, lui offrent une alternative à l'hégémonie du point de fuite unique, tandis que les travaux de Linda Dalrymple Henderson sur la quatrième dimension et la géométrie non-euclidienne alimentent sa réflexion tant historique que théorique.

Des motifs, récurrents dans sa production, tels que les fenêtres, les miroirs, l'eau – sa transparence, sa profondeur et ses reflets – ou encore les routes, témoignent de cette volonté d'inventer pour la peinture un espace spécifique ; le paysage américain, découvert à partir de 1964 et longuement arpenté en voiture depuis 1978, date de son installation définitive à Los Angeles, lui en a sans doute plus qu'aucun autre fourni l'occasion. Si sa production américaine, de son propre aveu, se distingue de l'anglaise par l'intensité de son chromatisme, elle se caractérise également par la prise en charge de vastes étendues nécessitant des solutions plastiques spécifiques : déroulé panoramique de 6 mètres de longueur pour le Santa Monica Boulevard (1978-1980) jamais achevé ; vue plongeante et simplification pour Nichols Canyon (1980, collection particulière) ; découpage et assemblage de toiles de petit format transposant en peinture le procédé des photocollages pour A Bigger Grand Canyon (1998, National Gallery of Australia). Inspiré par de nombreux séjours dans le Yorkshire, il peint des paysages (More Felled Trees on Woldgate, 2008). Pour réaliser des œuvres de grandes dimensions, il assemble des toiles (Peinture sur le motif pour le nouvel âge post-photographique, 2007, cinquante toiles formant un tableau de 457,2 cm x 1219,2 cm) ou des photographies (7 November11.30 am and26 November9.30 am,2010, Woldgate Woods,Yorkshire). En 2012, il présente à la Royal Academy of Arts de Londres les impressions de ses premiers dessins conçus sur iPad.

À l'horizon de ces différentes expériences, s'affirme la recherche d'un mode d'expression plus conforme à la perception humaine, rendant véritablement compte de la mobilité et des errances du regard et tendant de plus en plus, pour ce faire et via divers procédés,[...]

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