GOODIS DAVID LOEB (1917-1967)
David Loeb Goodis, né en 1917 à Philadelphie (Pennsylvanie), fréquente l'université d'Indiana, puis la Temple University de Philadelphie. Après avoir, selon une solide tradition, exercé divers petits métiers : docker, manœuvre, employé d'une compagnie de navigation, il devient journaliste et trouve en 1938 un poste dans une agence de publicité new-yorkaise. C'est alors qu'il écrit son premier roman, Retreat from Oblivion, qui sera publié en 1939. Déterminé à devenir romancier professionnel, il travaille pour la radio et les magazines populaires. Son deuxième roman, Cauchemar (Dark Passage, 1946), est acheté par la Warner Bros et porté à l'écran par Delmer Daves l'année suivante, avec Humphrey Bogart et Lauren Bacall, sous le titre Les Passagers de la nuit. Dès lors, Goodis travaille pour Hollywood comme scénariste jusqu'en 1950. Il regagne alors sa ville natale, Philadelphie, pour ne plus la quitter.
L'univers de Goodis se caractérise par sa désespérance. Dans la plupart de ses romans, il utilise le même antihéros : l'homme déchu, jadis heureux et bien installé dans une société qui, à présent, le rejette. Le loser, devenu une épave plus ou moins alcoolique, se complaît dans sa déchéance sordide ; il survit dans les bas quartiers d'une cité hostile (Philadelphie le plus souvent). Un moment, le passé refait surface : le temps que dure le récit, l'homme recouvre sa dignité — pour aider plus misérable que lui —, affronte tous les dangers, avant de retomber définitivement dans son marasme. Tirez sur le pianiste (Down There, 1956), porté à l'écran par François Truffaut en 1960, illustre exactement la thématique goodisienne. Parmi ses livres les plus remarquables, citons Vendredi 13 (Black Friday, 1954), L'Allumette facile (Fire in the Flesh, 1957) et surtout le chef-d'œuvre résumant tout son univers, véritable blues déchirant : Épaves (Street of the Lost, 1952).
Après avoir sombré dans l'alcoolisme, ce romancier qui est devenu un mythe meurt en 1967, âgé de quarante-neuf ans, dans une solitude quasi totale. Vedette d'un moment, puis tombé dans l'oubli aux États-Unis, le « Lautréamont du roman noir » représente un parfait exemple d'écrivain maudit ; par un bizarre paradoxe du destin, c'est grâce à son succès européen qu'il connaît actuellement un regain d'intérêt dans son propre pays.
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Écrit par
- Michel LEBRUN : écrivain
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