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DÉCENTRALISATION

Les organes administratifs centraux ne peuvent, par eux-mêmes, assurer l'accomplissement des tâches administratives en chaque point du territoire. Il faut des relais locaux à leur action. Pour l'aménagement de ces structures locales, deux nécessités sont à prendre en considération : un minimum d'homogénéité doit exister dans l'action administrative exercée sur l'ensemble du territoire, faute de quoi l'unité nationale disparaît ; mais l'existence d'aspirations propres à certaines parties du territoire ne doit pas être méconnue, l' administration devant s'adapter à la diversité des administrés. À l'impératif d'unité correspond la centralisation ; à la revendication de diversité, la décentralisation. L'organisation administrative locale n'opte jamais absolument pour l'unité ou pour la diversité. Elle s'efforce de faire un dosage savant entre les deux formules. L'unité et la diversité sont toutes deux prises en considération à des degrés divers dans chaque système choisi.

Certains pays (la France par exemple) ont longtemps été marqués par une tendance profonde à la centralisation. D'autres États ont, au contraire, choisi une solution fédérale, qui laisse une large possibilité d'expression aux autonomies locales (États-Unis, Allemagne). L'évolution actuelle conduit à une certaine uniformisation des régimes. Dans les États fédéraux, un mouvement centripète a réduit le pouvoir de décision local (États-Unis). Les États centralisés ont été obligés de reconsidérer leurs structures (France). La centralisation excessive et l'autonomie absolue apparaissent également condamnées au bénéfice d'une collaboration des centres de décision nationaux et locaux.

La centralisation, même lorsqu'elle s'accompagne d'une déconcentration (qui consiste, pour le pouvoir central, à remettre des pouvoirs de décision à ses propres agents locaux et non, comme c'est le cas de la décentralisation, à des organes ou personnes élus par les administrés), implique le rattachement à l' État de tous les actes administratifs, y compris ceux dont la portée est localisée. Avec la décentralisation, un pas important est franchi, apparaissent de nouvelles personnes publiques autonomes à ressort territorial ou à compétence limitée : les collectivités territoriales ou les établissements publics. La décentralisation implique la gestion par les administrés des affaires qui les concernent le plus directement.

Elle permet d'associer les administrés à la prise des décisions. L'intérêt de ceux-ci pour tout ce qui concerne leur cadre de vie immédiat est évidemment plus grand que celui qu'ils peuvent porter à des décisions nationales. Le « localisme », dans la vie publique, n'est pas forcément un défaut, s'il permet d'amorcer la participation politique du citoyen. La décentralisation peut constituer, en effet, un cadre commode d'éducation politique. Initiés à la gestion de leur cité, les citoyens appréhenderont mieux les problèmes politiques nationaux. L'apprentissage des cadres politiques pourra ainsi commencer à l'échelon local.

La décentralisation constitue aussi un corollaire indispensable de la démocratie. Elle correspond, pour l'organisation administrative, à ce qu'est la démocratie représentative pour l'organisation constitutionnelle. Elle permet de créer des collectivités territoriales ou des établissements publics : autant de freins aux velléités autoritaires du pouvoir central. Cela est particulièrement exact sur le plan territorial. Associations naturelles de citoyens, les collectivités territoriales seront des corps intermédiaires bienfaisants, qui pourront s'interposer entre l'individu et l'État. Elles susciteront des règles adaptées à chaque cadre[...]

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Écrit par

  • : agrégé des facultés de droit, doyen honoraire, président d'université honoraire, directeur du Centre de recherches administratives d'Aix-Marseille, président du Conseil de surveillance du Dauphiné libéré

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