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DÉCOUVERTE DE L'HYDROGÈNE PAR CAVENDISH

L’article envoyé en mai 1766 par l’honorable Henry Cavendish (1731-1810) à la Royal Society, dont il est membre, décrit de façon magistrale la découverte d’un gaz léger s’échappant de certaines réactions chimiques : l’hydrogène. Ces travaux, publiés dans la livraison datée du 1er janvier 1766 des Philosophical Transactions, sont titrés « Three Papers Containing Experiments on Factitious Air ». Cavendish y décrit des expériences originales et décisives sur ce qu’il nomme « air factice », à savoir les substances gazeuses contenues dans certains corps dont on peut les extraire.

Quelques années avant que Lavoisier marque par ses travaux ce qu’on a coutume de considérer comme la naissance de la chimie moderne, le développement de la chimie pneumatique avait permis des progrès importants dans la connaissance des gaz. Ainsi, Joseph Black (1728-1799) avait récemment identifié l’« air fixe » (le dioxyde de carbone), un air factice obtenu à partir des substances alcalines en les dissolvant dans des acides ou en les calcinant, et qui se différencie de l’air atmosphérique par le fait qu’il ne permet pas aux êtres vivants de respirer. L’aristocrate anglais Cavendish étudie le premier de façon scientifique l’« air inflammable » que les alchimistes préparaient par l’action d’acide sur des métaux. Les recherches des chimistes étaient alors imprégnées par la théorie du phlogistique, développée par le médecin allemand Georg Ernst Stahl, qui considérait que tout corps inflammable contient un principe igné – appelé phlogistique – qui se dégage sous la forme d’une flamme, laissant des cendres « déphlogistiquées ».

Dans une sorte de préface, Cavendish précise d’abord sa façon de récupérer les gaz produits lors de ses expériences, puis de les transférer d’un récipient à un autre en s’assurant de leur caractère étanche par l’emploi d’un lut composé d’une poudre d’amande mélangée à de la colle et battue de façon répétée par un lourd marteau.

Dans la première partie, Cavendish étudie minutieusement la production de ce qu’il nomme « air inflammable » et que Lavoisier baptisera « hydrogène ». En faisant réagir sur du zinc, du fer et de l’étain diverses solutions d’acide vitriolé (l’acide sulfurique) ou d’esprit de sel (l’acide chlorhydrique), il récupère et analyse le dégagement gazeux ; il le mélange à de l’air en des proportions variables et étudie la force de l’explosion résultant de l’approche d’une flamme. Il montre aussi qu’il n’est pas soluble dans l’eau ou l’ammoniaque. En comparant les observations faites sur des gaz inflammables issus de divers métaux, il en déduit qu’il s’agit d’une seule substance et détermine par des pesées répétées et une analyse rigoureuse des incertitudes des mesures qu’il est environ onze fois plus léger que l’air. Cavendish identifie naturellement cet air inflammable au phlogistique. Puisque le métal est inflammable, contrairement à l’acide, il considère que cet air inflammable était enfermé dans le métal. Quelques années plus tard, Lavoisier interprétera correctement les données expérimentales de Cavendish en démontrant le caractère erroné de la théorie du phlogistique.

Cavendish décrit ensuite dans une deuxième partie seize expériences sur les « airs fixes » de Black, puis, dans la troisième partie, il s’intéresse aux gaz produits par la fermentation de végétaux ou la putréfaction de substances animales. Il étudie en particulier de façon détaillée le comportement d’une solution de sucre roux additionnée d’une levure et maintenue à une température fixe, en récoltant les vapeurs produites pendant les dix jours que dure le processus. Il montre que la fermentation produit des quantités mesurables d’air inflammable et d’air fixe mais sans doute aussi d’autres substances gazeuses qu’il ne peut pas identifier.[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

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