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DÉLOS, CENT CINQUANTE ANS DE FOUILLES ARCHÉOLOGIQUES

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Les travaux de l’École française d’Athènes, fondée par une ordonnance de Louis-Philippe en 1846, sont étroitement liés aux fouilles archéologiques conduites à Délos à partir de 1873. À la veille des jeux Olympiques de 1896 et pour célébrer le cinquantenaire de l’institution, Salomon Reinach avait imaginé une fête superbe dans l’île d’Apollon. « Le port de Délos reverrait pour un jour le bel encombrement d’autrefois et je réponds que le feu d’artifice tiré au sommet du Cynthe serait merveilleux. » Ce rêve resta sans suite. Si, en 2023, le cent cinquantenaire des fouilles françaises à Délos n’a pas non plus donné lieu à pareil spectacle, cet anniversaire invite à revenir sur une aventure archéologique exceptionnelle.

En octobre 2023, l’Institut de France a commémoré l’événement par une rencontre, autour de l’exposition Délos et les pierres. La fabrique d’une ville antique à la villa Kérylos (Beaulieu-sur-Mer). Un cadre idéal puisque la maison conçue entre 1902 et 1908 par Théodore Reinach et son architecte Emmanuel Pontremoli a pour modèle les plus riches demeures déliennes. L’École française d’Athènes, dirigée par Véronique Chankowski, a présenté dans ses jardins, au flanc du Lycabette, douze panneaux préparés par Jean-Charles Moretti et retraçant les grands moments d’une rencontre entre des hommes et une terre s’offrant à eux. À Lyon, grâce à Hélène Wurmser, une exposition Embarquement pour Délos au musée des Moulages et un colloque de trois jours, du 21 au 23 mars 2024, ont jeté les jalons d’une histoire de l’archéologie délienne.

« La nourrice d’Apollon, l’île sacrée de Délos » (Callimaque)

Terrasse des Lions, île de Délos (Grèce) - crédits : Philippe Lemonnier/ EUF

Terrasse des Lions, île de Délos (Grèce)

Comme souvent en Grèce, tout commence par un mythe. Ortygie, un rocher peuplé de cailles, est devenue Délos, « la brillante », par le miracle d’une double naissance divine. Léto, enceinte de Zeus et poursuivie par la haine d’Héra, trouva refuge sur cet îlot pour accoucher d’Apollon et d’Artémis. C’est ainsi que se constitua au cœur des Cyclades, dès le viiie siècle av. J.-C., un sanctuaire autour du culte de la mère et de ses enfants. Il assura la prospérité d’une communauté cosmopolite, mettant à profit la proximité des divinités tutélaires, tout en se tournant vers le grand commerce maritime. Pendant toute la période hellénistique, puis sous la domination romaine, le comptoir délien fut en mer Égée un trait d’union entre l’Orient et l’Occident. Mais, dès le vie siècle de notre ère, l’île, désertée par ses habitants, retourna à la solitude de ses débuts.

Des voyageurs ne recommencèrent à la fréquenter que neuf siècles plus tard. Parmi eux, le marchand Cyriaque d’Ancône qui parcourt le site pendant une journée, le 11 avril 1445. Ébloui par la beauté des lieux, il compose une prière à Hermès ‒ un hommage aussi beau que celui de Renan sur l’Acropole d’Athènes. C’est le début d’une série de pèlerinages conduits jusqu’au siècle des Lumières par des audacieux, comme le médecin Jacob Spon ou le botaniste Joseph Pitton de Tournefort. Pourtant, ces lieux désolés effraient encore les archéologues au milieu du xixe siècle. Pour le plus grand nombre, il n’y a plus rien à sauver. Tant, écrit Charles Benoist en 1847, « cette dévastation de Délos dépasse tout ce qu’on peut imaginer ». Léon Terrier qui rédigea en 1864 une description très précise de l’état des ruines se montra inquiet de les voir disparaître. Son mémoire, présenté à l’Académie des inscriptions et belles-lettres, ne fut pas publié.

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire ancienne, université de Bourgogne, Dijon

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Terrasse des Lions, île de Délos (Grèce) - crédits : Philippe Lemonnier/ EUF

Terrasse des Lions, île de Délos (Grèce)