DÉMENCE PRÉCOCE
Ancien nom de la schizophrénie. Kraepelin (1855-1926) choisit cette expression en 1883 pour désigner des « démences » observées chez des jeunes gens ; en 1896, il rapporta ces cas à l'hébéphrénie de Kahlbaum-Hecker ; enfin, en 1899, il reprit le terme pour nommer une maladie mentale incurable, évolutive, vaguement parallèle à la paralysie générale, et dont il proposa de faire une entité opposée point par point à la folie circulaire de Falret, ou psychose maniaco-dépressive, qu'il considérait comme curable. Le regroupement de la démence précoce était nécessaire, puisqu'elle risquait d'éclater en ses formes cliniques, décrites comme des maladies autonomes : l'hébéphrénie de Hecker, la catatonie de Kahlbaum et la démence paranoïde décrite par Kraepelin lui-même en 1893. Ce regroupement était légitime, bien que peut-être trop large puisqu'il englobait des délires systématisés ; mais surtout le nom était malheureux, puisqu'il ne s'agissait pas là d'une démence au sens technique du mot et que la maladie n'apparaît pas toujours tôt dans la vie. Aussi la plupart des auteurs se rallièrent-ils à la dénomination de schizophrénie proposée par Bleuler (1857-1939) en 1911.
Quelques psychiatres français (Claude, Heuyer) ont gardé l'expression pour désigner des formes de schizophrénie apparaissant précocement sur un terrain dégénératif, évoluant avec une relative rapidité et s'accompagnant d'atrophie cérébrale repérable par l'encéphalogramme. Jung avait écrit en 1906 une étude sur la psychologie de la démence précoce : un complexe à affect puissant produit une psychotoxine qui agit sur le cerveau, lequel ne s'oppose plus au retour du refoulé. Ce travail, probablement le premier essai d'un psychanalyste sur les psychoses, ne vainquit pas le scepticisme de Freud envers ce genre de recherche.
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Écrit par
- Georges TORRIS : docteur en médecine et en philosophie
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