DÉMOCRATIE CHRÉTIENNE
L'Amérique latine, l'Afrique et l'Asie
L'Amérique latine comptait deux partis démocrates-chrétiens avant la guerre (Chili, Uruguay) ; démocratisation des systèmes politiques aidant, ils sont aujourd'hui plus de vingt. Pourtant, le bilan d'ensemble reste mitigé : de poids électoral secondaire au Mexique, le mouvement est faiblement représenté dans les deux autres grands pays de la zone, le Brésil et l'Argentine. La D.C. n'a pas bénéficié d'un soutien de l'Église aussi fort qu'en Europe, et les partis traditionnels ont souvent mieux résisté à la modernisation du jeu politique : en Colombie, en Uruguay, au Honduras, le système des partis a peu évolué depuis 1900. En outre, les partis populistes se sont montrés des rivaux dynamiques : le péronisme argentin, le M.N.R. bolivien, l'A.P.R.A. au Pérou n'ont pas la tradition anticléricale des partis socialistes et radicaux européens. La faiblesse de l'encadrement ecclésial (petit nombre de prêtres, pratique religieuse épisodique, absence de syndicats chrétiens) a joué aussi son rôle. Enfin, la démocratie chrétienne a été fortement combattue par une gauche catholique influente dans les années 1970 et par un catholicisme traditionnel très conservateur, mais qui a su, lui aussi, se moderniser en profitant de la vague néo-libérale.
Le parti le plus puissant est la Démocratie chrétienne chilienne dont l'origine se situe en 1937, année où la jeunesse du Parti conservateur part fonder la Phalange. Vingt ans plus tard, le changement de nom s'accompagne d'un changement d'échelle : le Parti démocrate-chrétien gagne l'élection présidentielle de 1964 avec Eduardo Frei, perd le pouvoir en 1970 mais reste le premier des partis chiliens et s'oppose fortement au gouvernement socialiste et communiste du président Allende. Dissoute par les militaires en 1977, la D.C. conservera un rôle actif et sera le parti pivot de la démocratisation du système. En 1989, elle obtient avec Patricio Aylwin 30 p. 100 des voix et la présidence. Ce parti bien organisé est fortement enraciné dans les professions libérales, les syndicats et la paysannerie. Sa politique réformiste, sous Aylwin comme sous Frei, est parvenue à une certaine conciliation entre une économie de marché efficace et une réelle redistribution sociale. La présidente du Chili, Michelle Bachelet, élue en 2006, a été portée par une coalition composée de la Démocratie chrétienne (D.C.), du Parti pour la démocratie (P.P.D.), du Parti radical social démocrate (P.R.S.D.) et du Parti socialiste (P.S.).
L'autre grand parti démocrate-chrétien est le vénézuélien. Fondé en 1946, il est au pouvoir de 1968 à 1973 (Rafael Caldera) puis de 1979 à 1984 (Luis Herrera Campins). Le parti dispose d'un soutien populaire très important quoique inférieur à celui de son rival traditionnel, Action démocratique, de tendance populiste. Ailleurs en Amérique du Sud, la D.C. recueille des suffrages plus modestes. Elle est forte, en revanche, dans la plupart des pays d'Amérique centrale, où ses partis, fondés autour de 1960, ont obtenu le soutien des secteurs paysans, de nombreux travailleurs des villes et de cadres universitaires issus des mouvements catholiques.
En Asie, il faut mentionner le Parti démocratique indonésien de lutte, né d'une scission du Parti démocratique indonésien en 1996, et surtout le Mouvement social-chrétien, fondé aux Philippines en 1966, dont l'animateur, Raul Manglapus, s'opposera à la dictature de Ferdinand Marcos et sera nommé ministre des Affaires étrangères du gouvernement de Corazon Aquino. Un autre de ses membres, le général F. Ramos, a été élu président en 1992. Depuis lors, il est devenu en 1994 l'Union nationale de démocrates chrétiens.
En Afrique, les limites de l'implantation chrétienne et la très récente[...]
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Écrit par
- Pierre LETAMENDIA : maître de conférences de science politique à l'Institut d'études politiques de Bordeaux
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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