DENTS
Quelques problèmes généraux
Origine des dents jugales des Mammifères
Ce problème, qui est celui de l'origine de la plexodontie, a suscité de nombreuses théories.
Les théories « explicatives » s'appuient essentiellement sur l'anatomie comparée et sur l'embryologie. On a ainsi supposé que les nouvelles cuspides seraient apparues par « bourgeonnement », par « irritation fonctionnelle », par « concrescence », par « fusion de germes dentaires », soit de même génération, soit de générations successives (Bolk). Dans l'état actuel des connaissances, aucune de ces conceptions ne semble plus capable de rallier les suffrages.
Les théories « phylogénétiques » tentent de reconstituer l'évolution de la plexodontie en s'appuyant sur la paléontologie.
La théorie de la multituberculie, développée par M. Friant et R. Anthony (1932), propose de voir dans les molaires multicuspidées des Multituberculés un type (bunodonte) tout à fait généralisé, correspondant à un régime omnivore, et qui serait à l'origine des autres types de dents jugales de tous les Mammifères. Cette conception ne semble pas avoir résisté à l'épreuve du temps.
La théorie lépidomoriale de Stensiö et Ørvig (1961) a été d'abord développée pour rendre compte de l'origine des écailles placoïdes des Sélaciens. Stensiö et Ørvig ont montré que l'écaille placoïde, bien loin de constituer une unité structurale primitive, était au contraire une formation complexe, résultat d'un très long processus évolutif. Les éléments primordiaux de l'exosquelette seraient de minuscules cônes de dentine, les lepidomoria, différenciés à la limite dermo-épidermique au-dessus d'une anse vasculaire. Ces lepidomoria pourraient fusionner entre eux précocement pour former des écailles synchronomoriales plus complexes. Les synchronomoria à leur tour s'assembleraient en écailles cyclomoriales plus grandes, à partir desquelles on pourrait faire dériver l'écaille placoïde.
Comme la dent conique des premiers tétrapodes paraît clairement dérivée d'un type placoïde, elle serait donc passée au cours de son évolution première par les étapes successives décrites ci-dessus : sa simplicité ne serait qu'apparente. Dans cette perspective, l'apparition de la dent pluricuspidée des Mammifères ne serait qu'une manifestation (tardive) des potentialités morphogénétiques variées que la dent haplodonte (écaille placoïde) aurait héritées de son histoire antérieure complexe. Si la théorie lépidomoriale, basée sur des observations irréprochables, paraît extrêmement féconde pour l'étude des tissus durs des Vertébrés inférieurs, beaucoup pensent que l'application que l'on veut en faire pour rendre compte de la plexodontie des Mammifères est loin d'être pleinement convaincante.
Le néotrituberculisme, universellement accepté par les chercheurs, rend compte des faits connus et a apporté aussi une précieuse terminologie. Dû à Cope et Osborn (1874), modifié et complété par Gregory (1910) et Simpson (1936), le trituberculisme pose essentiellement le principe d'une différenciation progressive des dents jugales mammaliennes et se propose de mettre en évidence les homologies entre les diverses cuspides dentaires. Selon ces conceptions, il faudrait distinguer un stade primitif (trigonodonte), ou « trigone primordial », comprenant trois cuspides. Ce stade évolutif primitif est représenté par les molaires du Mammifère jurassiqueDryolestes. Ultérieurement, un « stade tribosphénique » se serait différencié : il est atteint chez le Mammifère paléocène Deltatheridium. Toutes les dents jugales mammaliennes pourraient dériver de ce schéma fondamental.
Si, en effet, chez les premiers Mammifères (non thériens), les cuspides des molaires sont alignées et non disposées en[...]
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Écrit par
- Armand de RICQLÈS : professeur au Collège de France, chaire de biologie historique et évolutionnisme
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