DÉPRÉCIATION MONÉTAIRE
Baisse plus ou moins rapide de la valeur d'une unité monétaire par rapport au métal précieux en référence auquel elle a été créée ou par rapport aux biens et services qu'elle permet d'obtenir. Toutes les monnaies, dans tous les pays et à toutes les époques, ont subi une dépréciation, et souvent elles finissent par disparaître pour être remplacées par une monnaie nouvelle, à laquelle on donne le nom de la précédente, d'une de ses divisions ou unités de compte, ou bien encore une appellation nouvelle.
La forme la plus ancienne de la dépréciation monétaire remonte à l'époque où les pièces de monnaie en métal précieux en circulation étaient rognées soit par les souverains émetteurs — ce qui fut le cas de Philippe le Bel en France —, soit par les changeurs entre les mains desquels elles passaient. La dépréciation des monnaies de papier, par contre, est due non pas à une diminution quantitative, mais à une augmentation du nombre des unités en circulation. C'est ce qui est arrivé aux assignats sous la Révolution française et, après la Première Guerre mondiale, au Reichsmark dont la dépréciation a été particulièrement rapide et spectaculaire. Le développement de la production industrielle et des échanges, le foisonnement des opérations de crédit et leurs effets multiplicateurs, les destructions provoquées par les guerres entraînent dans le monde entier au xxe siècle une dépréciation monétaire dont le rythme est variable selon les pays et les époques, mais qui paraît irréversible : tout se passe comme si la monnaie, dans son rôle d'instrument des échanges, subissait une « érosion », une usure proportionnelle à l'intensité de son usage, comme un instrument physique. Une des conséquences de cette évolution est qu'il devient de plus en plus difficile de se servir de la monnaie comme instrument de mesure de l'activité économique. Dépréciation monétaire et hausse des prix vont de pair, étant l'une par rapport à l'autre à la fois cause et effet. On désigne l'ensemble de ces phénomènes par le terme général d'inflation, dont le sens physique indique bien que les comptes en monnaie offrent une image déformée, exagérément gonflée, des réalités économiques et en particulier de la croissance.
La dépréciation monétaire est partout, mais elle n'est pas partout la même en même temps. L'unité monétaire d'un pays donné peut subir une dépréciation due à des causes internes : pénurie de certaines denrées ou matières premières, hausses successives des prix et des rémunérations, politiques des gouvernements en matière de fiscalité et d'investissements ; comme ces facteurs n'agissent pas simultanément avec la même intensité sur des pays dont les données économiques sont différentes, il en résulte des différences de rythme de la dépréciation monétaire qui se traduisent par les fluctuations des monnaies les unes par rapport aux autres sur les marchés des changes. Les mouvements de la balance du commerce extérieur peuvent, selon les cas, tendre à aggraver ou à compenser ces fluctuations. La monnaie étant elle-même l'objet d'un commerce international, la dépréciation d'une unité monétaire donnée peut être accélérée et aggravée par des opérations spéculatives qui provoquent des demandes de devises étrangères hors de proportion avec les nécessités de l'importation de biens et de services concrets. Ces mouvements entraînent toujours inévitablement une augmentation de la masse monétaire totale, tant pour la monnaie qui se déprécie que pour la monnaie par rapport à laquelle elle se déprécie.
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Écrit par
- Georges BLUMBERG : licencié en droit, diplômé de l'École nationale des langues orientales vivantes, professeur à la faculté libre, autonome et cogérée d'économie et de droit, Paris
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