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DER FREISCHÜTZ (C. M. von Weber)

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Carl Maria von Weber - crédits : Photos.com/ Thinkstock

Carl Maria von Weber

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« Opéra romantique » en trois actes composé entre 1817 et 1821 par Carl Maria von Weber, Der Freischütz (Le Freischütz) est créé le 18 juin 1821 au Königliches Schauspielhaus de Berlin sous la direction du compositeur, avec notamment le ténor Karl Stümer (Max), la soprano Karoline Seidler (Agathe) et le baryton Heinrich Blume (Kaspar). Il reçoit un accueil enthousiaste de la part du public et fait de son auteur le père véritable de l'opéra romantique allemand, à une époque où les opéras italiens, notamment ceux de Gaspare Spontini, jouissent à Berlin d'une faveur considérable. Le livret du Freischütz a été écrit par Johann Friedrich Kind, qui s'est notamment inspiré du Livre des esprits (Gespensterbuch) de Johann August Apel et Friedrich Laun (1810). L'œuvre connaîtra deux versions françaises. La première, de Castil-Blaze, représentée le 7 décembre 1824 à l'Odéon, à Paris, sous le titre Robin des bois ou les Trois Balles, constitue, sous couvert d'une acclimatation au goût français, une véritable trahison de l'original. La seconde, de Berlioz (Le Freyschütz, créée à l'Académie royale de musique de Paris – salle Le Peletier – en juin 1841), tout en étant bien plus respectueuse de l'œuvre de Weber, présente le défaut de mettre en chant tous les récitatifs parlés du mélodrame de la Gorge-aux-Loups, qui constitue pourtant, à bien des égards, un des passages les plus caractéristiques de la partition.

Argument

L'action se déroule en Bohême, au milieu du xviie siècle, vers la fin de la guerre de Trente Ans.

L'ouverture du Freischütz, qui est devenue une célèbre pièce de concert, présente les principaux thèmes qui apparaîtront dans l'opéra. Dans son Grand Traité d'instrumentation et d'orchestration modernes (1843), Hector Berlioz soulignera notamment « la phrase rêveuse de Clarinette, accompagnée d'un tremolo des instruments à cordes, dans le milieu de l'Allegro ».

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Acte I. Dans une clairière. Le garde-chasse Max (ténor) vient d'être battu à un concours de tir par le riche paysan Kilian (baryton). Le garde-forestier Kuno (basse) lui fait part de son inquiétude : une autre compétition doit avoir lieu le lendemain en présence d'Ottokar, prince de Bohême ; la main de sa fille Agathe ainsi que sa succession sont offertes au vainqueur et il compte bien sur le succès de Max. Resté seul, Max, qui est épris d'Agathe, pense être victime d'un sortilège et récrimine contre son sort (air « Durch die Wälder, durch die Auen » : « Par les forêts et par les plaines », dont le thème figure dans l'ouverture). L'inquiétant Kaspar (basse), un autre garde-chasse, lui propose ses services : il lui prête son fusil et lui indique un oiseau haut dans le ciel, que même le chasseur le plus expérimenté ne saurait atteindre. Max tire : un aigle tombe à ses pieds. Kaspar lui apprend que la balle qu'il a utilisée est magique et ne manque jamais son but : cette « balle franche » – Freikugel –, explique le titre, intraduisible, de l'ouvrage. Si Max rejoint Kaspar à minuit à la Gorge-aux-Loups, il pourra fondre avec lui les balles qui lui assureront la main de celle qu'il aime. Max, d'abord réticent car il sait que la Gorge-aux-Loups est un lieu maléfique, finit par accepter. Resté seul, Kaspar chante sa joie : en acceptant, Max livre son âme au démon Samiel, en échange de la sienne.

Acte II. Dans la maison de Kuno, Agathe (soprano) et sa cousine Ännchen (soprano) attendent le retour de Max ; Agathe a été légèrement blessée au front par la chute du portrait d'un de ses ancêtres. Ännchen, en dépit de son caractère enjoué et de ses nombreuses tentatives (ariette « Kommt ein schlanker Bursch gegangen » : « Quand s'en vient vers nous un beau jeune homme »), ne parvient pas à réconforter Agathe, que préoccupent les échecs de Max et la mise en garde alarmante que lui a faite un vieil ermite. Seule, elle confie à la nuit étoilée ses espoirs et ses craintes (célèbre air « Leise, leise, fromme Weise ! » : « Doucement, doucement, pieuse mélodie ! », exposé dans l'ouverture). Max arrive et apprend avec inquiétude qu'Agathe a été blessée à l'heure même où il abattait l'aigle. Il dit devoir se rendre au plus vite à la Gorge-aux-Loups, prétextant qu'il doit récupérer un cerf qu'il y a abattu. À l'évocation du lieu maudit, les jeunes filles sont horrifiées. Mais ni leurs prières, ni l'accumulation des signes inquiétants ne dissuadent Max de son entreprise.

La Gorge-aux-Loups, effrayante : dans ce lieu infernal rôdent des esprits invisibles. Kaspar invoque Samiel, le « chasseur noir » à qui il a vendu son âme. Samiel (rôle parlé) apparaît ; Kaspar, qui sait être parvenu au terme de son existence, demande à Samiel que son séjour terrestre soit prolongé, en échange de quoi il lui livrera l'âme de Max. Samiel accepte : Kaspar coulera sept balles franches ; six obéiront à Max, la septième frappera Agathe. Max, qui ignore tout de ce pacte, arrive et, surmontant la terreur que lui causent des visions fantastiques, observe Kaspar qui procède à la fonte des balles. Cette scène de la Gorge-aux-Loups prend la forme d'un mélodrame, c'est-à-dire d'un texte parlé superposé à un accompagnement instrumental. Chaque balle est accompagnée d'apparitions de plus en plus terrifiantes, soulignées par des effets orchestraux dont l'audace a rarement été dépassée : des oiseaux de nuit, un sanglier noir, une tempête qui se lève, des roues de feu, des chasseurs et une meute, le tonnerre et les éclairs, des feux follets ; à la septième, Samiel apparaît ; Max s'écroule à terre. Dans La Vie de Rossini (1823), Stendhal évoquera « le tapage infernal de la fin du morceau de la formation des balles diaboliques ».

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Acte III. Dans la forêt, le matin du concours. Max, vexé par ses récents échecs et ravi de pouvoir prendre sa revanche, épuise une partie de ses munitions merveilleuses en fanfaronnades. Il ne lui reste plus que la septième balle.

Dans sa chambre, Agathe se prépare pour la fête (cavatine « Und ob die Wolke sie verhülle » : « Et même si d'un nuage il se voile ») en compagnie d'Ännchen (air « Trübe Augen » : « Des yeux humides »), aidée par l'assemblée des jeunes filles (Volkslied « Wir winden dir den Jungfernkranz » : « Nous venons te présenter la couronne virginale »). Agathe ouvre la boîte qui contient la couronne : à sa place se trouve une couronne mortuaire argentée !

Dans une prairie, le prince Ottokar, Kuno, Max Kaspar et les chasseurs sont assemblés (chœur des chasseurs : « Was gleicht wohl auf Erden dem Jägervergnügen ? » : « Vraiment, qu'est-il sur cette Terre qui égale les plaisirs du chasseur ? »). Vient le tour de Max. Ottokar (rôle parlé) lui indique sa cible, une colombe blanche sur une branche, mais, au moment où il va tirer, Agathe surgit du bosquet où se trouve l'oiseau, accompagnée de l'Ermite, qui lui a révélé le maléfice dont le jeune homme est victime. Elle le met en garde : la colombe, c'est elle ! Trop tard : le coup est parti. Agathe n'est que blessée, mais Kaspar, qui s'était caché dans un arbre pour observer la scène, tombe mortellement touché. Alors que Samiel vient s'emparer de son âme, Kaspar expire en maudissant les cieux. Choqué par ce blasphème, Ottokar somme Max de s'expliquer et celui-ci avoue son forfait. Courroucé, le prince le condamne à l'exil. Mais l'Ermite (basse) apparaît, qui déplore que le bonheur d'un couple dépende de la course d'une balle ; il sollicite la clémence du prince, demandant que le jeune homme expie son crime pendant une année, au terme de laquelle il pourra épouser Agathe. Un chant d'allégresse célébrant l'harmonie retrouvée conclut l'opéra.

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure et de Sciences Po Paris, assistant à l'université Marc Bloch (Strasbourg), critique musical

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Carl Maria von Weber - crédits : Photos.com/ Thinkstock

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