DÉSIR (notions de base)
Désir et autonomie
Contemporain de Hobbes, qui a lu ses œuvres, Baruch Spinoza (1632-1677) propose, dans l’Éthique (1677), des réflexions allant dans la même direction. S’il ne conteste pas qu’un grand nombre de nos désirs nous mettent sous la dépendance d’une réalité externe (objet ou personne), il refuse lui aussi de confondre désir et besoin. Tout ne provient pas du monde extérieur. La nature a mis en nous une puissance, à laquelle Spinoza donne le nom de conatus (l’un des termes latins signifiant « désir »), un désir de « persévérer dans notre être », d’augmenter notre puissance d’agir, de nous développer physiquement et spirituellement. Si nous sommes à l’écoute de cette voix intérieure propre à chacun d’entre nous, nous ressentirons une force qui nous pousse vers l’extérieur et qui nous fera désirer les choses qui nous sont le plus favorables. « Le Désir est l’appétit accompagné de la conscience de lui-même [...] Nous ne désirons aucune chose parce que nous la jugeons bonne ; mais au contraire, nous jugeons qu’une chose est bonne parce que nous nous efforçons vers elle, la voulons, appétons et désirons » (Éthique, livre III, Proposition IX, scolie).
On assiste donc, chez Spinoza comme chez Hobbes, à une réhabilitation du désir absolument révolutionnaire. Si ces philosophes restent lucides sur les « mauvais désirs », ceux qui nous emprisonnent, ceux que nos contemporains appellent « addictions », ils refuseront de louer inconditionnellement l’éradication des désirs, convaincus qu’ils constituent une part irremplaçable de nous-mêmes.
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Écrit par
- Philippe GRANAROLO : professeur agrégé de l'Université, docteur d'État ès lettres, professeur en classes préparatoires
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