DÉTERMINATION DU SEXE CHEZ LES VERTÉBRÉS FOSSILES
L'os médullaire, un indice déterminant
De tels travaux sur l'ADN ancien ne sont possibles que pour des espèces éteintes il y a au plus quelques dizaines de milliers d’années, la molécule d’ADN étant très fragile et se dégradant facilement. En employant d'autres techniques, il a pourtant été possible de déterminer de façon probante le sexe d'oiseaux ayant vécu au début du Crétacé, il y a quelque 125 millions d'années.
Pour ce faire, la paléontologue sud-africaine Anusuya Chinsamy-Turan et ses collaborateurs ont étudié l'histologie osseuse de Confuciusornis sanctus, un oiseau archaïque très abondant dans les dépôts lacustres du nord-est de la Chine, gisements célèbres pour l'exceptionnelle conservation de leurs fossiles. Le plumage des oiseaux étant souvent bien conservé dans ces sédiments à grain très fin, on a constaté depuis les années 1990 que certains spécimens portent à l'arrière du corps une paire de très longues plumes élargies à leur extrémité, alors que d'autres n'en montrent pas. Comme chez les oiseaux ce sont généralement les mâles qui possèdent le plumage le plus exubérant, on a pensé que les Confuciusornispossédant ces deux longues plumes étaient les mâles et les autres les femelles. Cette hypothèse restait cependant à confirmer par des preuves indiscutables. Pour ce faire, les chercheurs se sont intéressés à un tissu bien particulier, fortement minéralisé, l'os médullaire, qui se développe à l'intérieur des os longs creux des oiseaux femelles avant la période de la ponte, et sert ensuite de réservoir de calcium pour la formation de la coquille des œufs. Ce tissu très spécifique a été découvert dans les os d'un squelette de Confuciusornis, montrant qu'il s'agissait d'une femelle ayant atteint la maturité sexuelle. De plus, ce fossile fait partie de ceux qui ne possèdent pas la paire de plumes très allongées à l’arrière du corps.
La démonstration est donc faite : ce sont bien les Confuciusornismâles qui portaient ces plumes ornementales. La mise en évidence d'os médullaire est donc une méthode fiable pour l'identification du sexe chez des fossiles d'animaux ovipares possédant chez les femelles aptes à la reproduction ce type de tissu osseux. La méthode peut donc être utilisée non seulement chez les oiseaux, mais aussi chez les dinosaures « non aviens », chez lesquels l'os médullaire est également présent, alors qu'il est inconnu chez d'autres ovipares (y compris les crocodiles).
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Écrit par
- Eric BUFFETAUT : directeur de recherche émérite au CNRS
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Médias