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DÉVELOPPEMENT DES ÉMOTIONS

Le vécu émotionnel, son expression et sa régulation

Si la question de l’origine des émotions primaires fait débat, il existe désormais un relatif consensus en faveur de l’idée selon laquelle les premières semaines de vie sont marquées par un vécu émotionnel bipolaire. Le nourrisson fait l’expérience de deux émotions générales, le plaisir et la détresse. Ces états émotionnels s’affinent et se déclinent en diverses émotions discrètes au cours des premiers mois de vie. De la dimension de plaisir émerge l’émotion de joie ; et de la détresse les émotions de tristesse et de colère, puis de dégoût et de peur.

L’émotion de peur rend d’ailleurs compte du développement des relations affectives chez le jeune enfant. Aussi, les principales peurs exprimées entre l’âge de huit mois et deux ans – prudence envers l’étranger, peur de la nouveauté, de la séparation – sont-elles révélatrices du développement de ses liens d’attachement avec des adultes de référence. Les liens d’attachement sont conçus comme un double processus d’attachement/détachement, et correspondent au principal point d’appui de la régulation des émotions pour le jeune enfant. L’attachement procure un sentiment de sécurité qui aide l’enfant à interagir de manière sereine avec son environnement, menant à l’autonomie. La « procédure de la situation étrange » – test au cours duquel l’enfant doit gérer le départ et l’arrivée de son parent ou d’un étranger – est un moyen d’étudier la relation entre la qualité de l’attachement et les manifestations émotionnelles du jeune enfant.

À partir de la deuxième année, la prise de conscience de soi autorise les émotions secondaires, qui se complexifient ensuite avec l’ apprentissage social et l’intériorisation des règles. À partir de trois ans, elles apparaissent désormais tout particulièrement lorsque l’enfant évalue son comportement comme se situant en rupture par rapport à une règle ou à un standard du groupe d’appartenance. Par exemple, l’enfant ressent de la honte lorsqu’il a produit un comportement allant à l’encontre de ce qu’il sait approprié ou admis.

À l’âge scolaire, l’évolution des capacités cognitives et l’expérience des interactions amènent l’enfant à une régulation émotionnelle toujours plus complexe. Un des versants essentiels de cette régulation pour l’harmonie de ses interactions sociales correspond à la régulation de l’expression des émotions. L’enfant acquiert les règles d’expressivité, c’est-à-dire des règles apprises souvent implicitement quant à la manière d’exprimer ses émotions en fonction des circonstances. Entre l’âge de six et huit ans principalement, l’enfant acquiert la capacité de contrôler, modifier ou inhiber l’expression de ses émotions en fonction des règles sociales et des standards qu’il a intériorisés. L’émotion exprimée n’est alors plus nécessairement l’émotion ressentie. Lorsque l’enfant est face à une déception – par exemple quand un cadeau a peu de valeur à ses yeux – comme dans le test « de la situation décevante », il dissimule désormais son ressenti négatif. Par ailleurs, c’est aussi à cette période que se développe le vocabulaire lié aux émotions – le lexique émotionnel – qui permet à l’enfant d’exprimer d’une manière de plus en plus nuancée son état subjectif.

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Écrit par

  • : maître de conférences, habilitée à diriger des recherches en psychologie

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