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DÉVELOPPEMENT DES ÉMOTIONS

La compréhension et la reconnaissance des émotions chez autrui

La capacité de lire l’expression des émotions chez autrui correspond à un prérequis essentiel pour que s’établissent des relations interpersonnelles satisfaisantes. Force est de constater que, très tôt, le bébé possède des capacités de traitement de l’expression des émotions. Le canal de communication émotionnelle majoritairement étudié est l’expression du visage, et dans une moindre mesure la prosodie émotionnelle.

Des travaux célèbres montrent que les nouveau-nés portent particulièrement attention aux visages en comparaison à d’autres stimuli visuels, et perçoivent des changements d’expression faciale. Cette sensibilité précoce suggère un statut particulier pour ce vecteur de communication émotionnelle. Néanmoins, peu de résultats ont été recueillis sur les capacités de discrimination des expressions faciales émotionnelles avant l’âge de trois mois. Les travaux suggèrent que la joie est la première expression discriminée. Puis, vers six à huit mois, une discrimination émerge entre les autres émotions primaires. La question de la primauté du traitement de l’expression de joie suscite différentes interprétations, sans doute complémentaires. D’aucuns inscrivent ce résultat dans l’hypothèse du développement bipolaire des émotions : plaisant/déplaisant. Dans ce cadre, la joie se distinguerait car elle est la seule émotion plaisante. D’autres mettent en avant la configuration des traits prototypiques de la joie, avec le sourire si caractéristique. Enfin, cette primauté correspondrait à l’hypothèse de l’exposition : au quotidien, le bébé est plus souvent face à des visages exprimant de la joie.

La coloration émotionnelle de la voix, appelée prosodie émotionnelle, constitue aussi une forme cruciale de communication entre le bébé et l’adulte. Cela s’illustre par la préférence des bébés pour un style vocal d’interaction appelé motherese, dont les propriétés acoustiques correspondraient à des émotions positives. Ces émotions positives véhiculées par la voix manifesteraient au bébé l’intérêt bienveillant que lui porte l’adulte. En termes de discrimination, les bébés d’environ cinq mois seraient capables de discriminer les expressions vocales émotionnelles.

S’il est question de capacités perceptives pendant les premiers mois de vie, l’enfant utilise les expressions émotionnelles pour guider ses actions à partir de la fin de la première année. Dans une situation nouvelle ou ambiguë, le jeune enfant cherche de l’information – notamment sur le visage des adultes – pour donner du sens à cette situation. Il s’agit du comportement de référenciation sociale, classiquement évalué par l’épreuve « de la falaise visuelle », qui consiste à créer une illusion de profondeur, et à placer l’enfant face à ce potentiel danger. La mère se tient de l’autre côté du dispositif. Parce que le bébé agit en conséquence de l’information émise par l’adulte – il s’approche de la falaise visuelle à la vue de l’expression de joie, ou il l’évite à la vue de celle de peur −, ce comportement est la preuve de sa compréhension de la signification de l’expression émotionnelle. Outre la compréhension de l’expression émotionnelle d’autrui, c’est vers dix-huit mois – avec la conscience de soi – que se développe l’ empathie. Elle correspond au fait de reconnaître et ressentir l’émotion d’autrui en adoptant sa perspective. Par exemple, l’enfant met en place désormais des comportements d’aide à autrui.

À l’âge préscolaire et scolaire, la capacité de reconnaissance des émotions s’affine et devient plus subtile. Elle se développe de manière significative entre trois et dix ans, mais continue aussi de se développer pendant l’adolescence. Par exemple, la distinction entre des sourires sociaux, ou faux sourires,[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences, habilitée à diriger des recherches en psychologie

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