DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL Développement des pays du Sud
Les variables clés du développement
Ces évolutions contrastées invitent à s'interroger sur les moteurs de la croissance économique et sur l'existence de politiques capables d'infléchir les trajectoires observées. Les théories de la croissance, qui se sont développées depuis la fin des années 1940, mettent en évidence le rôle de deux variables clés : la croissance démographique et l'épargne.
La croissance de la population est néfaste, car elle dilue les ressources, alors que l'épargne, permettant l'accumulation de capital matériel, est un élément indispensable du décollage économique. Le sous-développement peut alors être représenté comme une situation dans laquelle le taux d'épargne est insuffisant pour engendrer un investissement permettant d'augmenter la production, de façon à compenser la baisse de la production par tête liée à l'accroissement de la population.
La transition démographique
La transition démographique est, pour une population donnée, le passage d'une situation de mortalité et de natalité élevées à une situation de mortalité et de natalité basses. Ce passage s'étale sur plusieurs décennies et comprend deux phases. Tout d'abord, la baisse rapide de la mortalité, notamment infantile, entraîne une explosion de la croissance démographique et du nombre de bouches à nourrir par travailleur, ce que l'on appelle le ratio de dépendance. Ensuite, l'ajustement progressif de la fécondité à ces nouvelles conditions entraîne une baisse du ratio de dépendance, baisse mécaniquement favorable à la croissance économique.
Les taux de fécondité ont baissé dans presque tous les pays du Sud depuis les années 1980, mais ils n'ont pas baissé au même rythme partout : l'Afrique subsaharienne est le sous-continent en développement où la transition est la plus tardive et la plus lente, tandis que l'Asie de l'Est est celui où celle-ci est la plus avancée.
Certains pays comme la Chine, et dans une moindre mesure l'Inde, ont mis en place des politiques de population visant à accélérer l'achèvement d'une transition démographique. En Inde, la politique de planification familiale, mise en place sous Indira Gandhi au début des années 1970, n'a eu qu'un succès limité, alors que la politique autoritaire de l'enfant unique mise en œuvre par le gouvernement chinois, contestable sur le plan des libertés individuelles, a bien eu les effets escomptés, particulièrement en zone urbaine.
Transition démographique et croissance économique sont des phénomènes largement concomitants : le ralentissement de l'accroissement démographique peut faciliter la croissance, et réciproquement les nouvelles conditions de vie permises par la croissance favorisent la transition démographique. La relation entre population et croissance est reconnue comme plus complexe encore ; en particulier, la densité de population des territoires est réputée faciliter l'intensification des techniques de production et l'innovation.
L'accumulation du capital et l'épargne
Toutes les représentations classiques du développement économique, notamment celles qui ont été proposées par Ragnar Nurkse (1953), Walt Whitman Rostow (1959), Hollis Chenery (1960) comprennent une phase d'accumulation de richesses précédant le décollage. La question est alors de comprendre comment engendrer une épargne suffisante pour permettre cette accumulation primitive, source des premiers investissements et de gains de productivité qui, à leur tour, suscitent un surcroît d'épargne réinvesti. Les économies qui ont une capacité d'épargne trop faible n'entrent pas dans ce cercle vertueux et demeurent enfermées dans la pauvreté. L'idée d'un seuil minimal a suggéré la nécessité de politiques ayant pour rôle d'augmenter fortement et rapidement le stock d'épargne.[...]
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Écrit par
- Denis COGNEAU : chargé de recherche à l'Institut de recherche pour le développement et à D.I.A.L. (Développement, institutions et analyses à long terme), docteur en sciences économiques de l'École des hautes études en sciences sociales
- Philippe DE VREYER : professeur à l'université Paris-Dauphine, directeur de l'unité mixte de recherche DIAL
- Sylvie LAMBERT : chargée de recherche de première classe, Institut national de la recherche agronomique
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