DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL Développement des pays du Sud
Le paysage transformé de l'aide au développement
Il est unanimement reconnu que les pays du Nord ont une responsabilité dans le développement des pays du Sud, ne serait-ce que parce que leurs évolutions et leurs décisions conditionnent très largement l'environnement dans lequel peut se faire ce développement, mais aussi parce que l'histoire de la colonisation et de l'impérialisme a profondément marqué les institutions actuelles des pays du Sud.
En tant que bailleurs de fonds bilatéraux, ou multilatéraux à travers les institutions internationales comme la Banque mondiale ou le Fonds monétaire international, ils jouent aussi un rôle déterminant dans le financement de l'accumulation pour de nombreux pays. L'action des pays du Nord s'observe ainsi de manière directe à travers le système d'aide publique au développement (A.P.D.) né au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et concrétisé par le Comité d'aide au développement (C.A.D.) de l'O.C.D.E., dont la création remonte à 1961. Le C.A.D. regroupe aujourd'hui 28 pays ainsi que l'Union européenne. Ses membres se sont fixé pour objectif de consacrer chacun au moins 0,7 p. 100 de leur revenu national brut (R.N.B.) à l'A.P.D. Le but est encore loin d'être atteint, puisque, en 2013, l'A.P.D. n'a représenté que 0,3 p. 100 du R.N.B. global des membres du C.A.D. Cette définition de l'aide au développement apparaît aujourd'hui obsolète. Ainsi, l'A.P.D. englobe des sommes qui ne sont pas destinées aux pays pauvres, par exemple les salaires versés aux employés des agences de développement ou les coûts d'accueil des réfugiés politiques. A contrario, certains coûts publics de l'aide au développement ne sont pas compris dans l'A.P.D. ; c'est le cas, par exemple, des dépenses fiscales constituées par le manque à gagner de l'État lorsqu'il consent une réduction d'impôt aux personnes qui font un don aux organismes privés d'A.P.D. De plus, de nouveaux acteurs de l'aide sont apparus, lesquels prennent de plus en plus d'importance. Il s'agit, d'une part, des pays dits émergents, hier récipiendaires de l'A.P.D. et aujourd'hui pourvoyeurs de fonds (Chine, Brésil...) et, d'autre part, des organisations non gouvernementales (Oxfam, Care...) et des fondations (Gates, Clinton, Soros, Hewlett...) dont les budgets rivalisent avec ceux des acteurs traditionnels de l'A.P.D., voire les dépassent. Même si elle reste globalement insuffisante, l'A.P.D. joue un rôle très important dans le financement des petits pays les plus pauvres (Afrique, Amérique centrale) qui en dépendent en grande partie pour leurs investissements en infrastructures, pour l’éducation et pour la santé, à travers des dons, des prêts à taux préférentiels et des annulations de dettes.
Dans certains pays, une augmentation massive de cette aide pourrait permettre de réaliser les Objectifs du millénaire pour le développement et d'enclencher un cercle vertueux de croissance économique. Il est cependant également considéré que l'absorption d'un fort surcroît d'aide n'est possible que par des pays ayant déjà une certaine solidité institutionnelle. Pour les autres pays, l'aide peut contribuer à renforcer progressivement la construction des institutions démocratiques (organisation des élections, constitution de contre-pouvoirs : syndicats, cours de justice...), quitte à financer directement leur fonctionnement (dépenses récurrentes, telles que les salaires des fonctionnaires).
L'action des pays du Nord ne se limite toutefois pas à l'aide financière directe. Sur le plan commercial par exemple, elle s'exerce de manière indirecte à travers l'accès que les pays du Nord accordent aux exportations agricoles ou manufacturées en provenance de ceux du Sud. De manière[...]
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Écrit par
- Denis COGNEAU : chargé de recherche à l'Institut de recherche pour le développement et à D.I.A.L. (Développement, institutions et analyses à long terme), docteur en sciences économiques de l'École des hautes études en sciences sociales
- Philippe DE VREYER : professeur à l'université Paris-Dauphine, directeur de l'unité mixte de recherche DIAL
- Sylvie LAMBERT : chargée de recherche de première classe, Institut national de la recherche agronomique
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Médias
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