DÉVELOPPEMENT, psychologie interculturelle
Le point de vue culturel sur le développement psychologique de l’enfant et de l’adolescent met en avant le fait que l’environnement dans lequel l’enfant grandit est historiquement et culturellement déterminé. Par conséquent, ce que nous observons du développement psychologique dans un contexte culturel donné (en Europe ou aux États-Unis, par exemple) n’est pas automatiquement généralisable à d’autres contextes. C’est pourquoi la psychologie interculturelle du développement comporte principalement deux objectifs : mieux connaître les caractéristiques du développement dans tel ou tel groupe culturel, et comparer les développements, soit pour apprécier l’impact supposé de différences culturelles attestées (en ce qui concerne par exemple les pratiques éducatives, les occasions d’exercice pour l’enfant, etc.), soit pour tester la généralité transculturelle des modèles de développement. Dans tous les cas, des questions de méthode doivent être considérées.
Questions de méthode
On ne peut pas transférer les procédures de recherche d’un groupe culturel à un autre, sans se poser la question de leur pertinence culturelle. Ainsi, le choix de la langue utilisée dans les entretiens psychologiques peut se révéler déterminant. Par exemple, Raphael M. Nyiti retrouvait les normes statistiques des stades piagétiens en interrogeant dans leur langue les enfants Micmac du Québec alors que les mêmes enfants étaient apparemment « en retard » quand ils étaient interrogés en anglais.
Plus généralement, des différences culturelles peuvent n’être qu’apparentes si on n’a pas pris soin de contrôler la signification culturelle des situations proposées. Par exemple, l’approche du développement moral selon Lawrence Kohlberg a été beaucoup critiquée parce qu’elle semblait relative au contexte occidental. Mais les dilemmes de Kohlberg, qui suscitent une opposition entre des critères légaux (application de la loi) et des critères moraux (valeurs), peuvent être adaptés et pensés du point de vue de chaque culture. En suivant cette démarche, des auteurs comme John R. Snarey soulignent la similarité transculturelle du développement moral, car la variabilité intraculturelle des jugements moraux l’emporte largement sur la variabilité interculturelle.
Il faut rappeler aussi que la relation qui s’établit entre un psychologue, qui interroge, et une personne (enfant ou adulte) qui répond aux questions posées, est toujours une relation sociale. Elle est donc obligatoirement interprétée en référence aux habitudes et aux normes culturelles de la personne interrogée. Il peut donc arriver que les observations soient faussées en raison de l’interprétation de la situation sociale créée. Dans certaines cultures, par exemple, il est particulièrement impoli de poser des questions à quelqu’un alors que l’on connaît déjà les réponses…
Les difficultés de méthode, comme celles que l’on vient d’exposer, obligent à déconseiller les comparaisons directes entre cultures à partir de tâches strictement identiques. De plus, comme les groupes culturels diffèrent entre eux sur de nombreux aspects, les comparaisons directes sont le plus souvent ininterprétables puisque de nombreuses variables différencient les groupes considérés et que les tâches ne sont pas a priori équivalentes. Il est plus pertinent d’étudier d’abord le développement dans tel ou tel groupe culturel, à partir d’observations dans des situations culturellement signifiantes. C’est seulement ensuite que les comparaisons pourront se faire en analysant les ressemblances et les différences, jusqu’à tester la validité transculturelle des modèles de développement.
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Écrit par
- Henri LEHALLE : professeur émérite, université de Montpellier-III-Paul-Valéry
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